Pérou: guide de randonnées, un métier émancipateur pour les femmes
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Longtemps exclues des expéditions touristiques au Machu Picchu, les femmes péruviennes sont désormais de la partie. Guides et porteuses sont de plus en plus nombreuses sur les chemins de randonnée. Reportage au départ d'un trek, à une centaine de kilomètres de Cusco.

Avec notre correspondante dans la région,
Sac à dos sur les épaules, bâtons de marche en main, Soledad et son collègue encadrent un groupe de 16 randonneurs. Au programme pour quatre jours de marche : 42 kilomètres et des passages à plus de 4 000 mètres d’altitude, pour atteindre la citadelle inca du XVe siècle, le Machu Picchu. « Aujourd’hui, c’est le jour le plus facile, nous allons au campement d’Ayapata. Ce chemin des incas, c’est comme notre bureau de travail. On y raconte notre histoire. Ce que je préfère, c’est la partager avec les groupes », raconte la guide.
Avant de venir dans la région de Cusco il y a deux ans, Soledad a travaillé dans la forêt amazonienne. Là-bas, les femmes sont guides depuis une dizaine d’années. Dans les Andes, c’est plus récent :
Avant, beaucoup croyaient qu’on était le sexe faible, qu’on ne pouvait pas guider un groupe, marcher sur de longues distances. Ici, sur le chemin inca, il y a parfois des tarentules. Eh bien, on ne s'enfuit pas en courant ! Les mentalités changent peu à peu. Nous sommes les femmes d’une nouvelle génération. Les entreprises commencent à évoluer aussi : elles nous font plus confiance, à nous les femmes, car nous sommes plus responsables.
Des qualités appréciées aussi chez les porteuses. Autour de Soledad, une vingtaine de porteurs en blouson vert fluo s’activent : tri des duvets, des matelas, des sacs de vêtements des touristes. Elle est la seule femme de l’expédition. Aujourd’hui, elle ne porte pas la jupe traditionnelle des Andes, mais un t-shirt floqué « Donner le pouvoir aux femmes ».
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« Aujourd’hui, on a l’opportunité de gagner un peu plus »
« Pour moi, rien n’est difficile, on peut tout faire ! Bien sûr, il y a encore beaucoup de machisme. Pendant longtemps, mon frère disait que c’était dangereux de travailler avec autant d’hommes », poursuit la jeune femme. Soledad a été l’une des premières embauchées, en 2018. Elle a candidaté après avoir lu une petite annonce dans les journaux : 70 euros pour quatre jours de portage.
« J'éduque mes deux fils seule, je dois tout payer : les factures, la pension… Avant, je travaillais dans des restaurants comme femme de ménage, mais aujourd’hui, on a l’opportunité de gagner un peu plus. C’est sûr que ça nous éloigne aussi de la famille, mais c’est aussi pour leur bien », conclut la guide.
Parmi les 200 collègues de Soledad, on retrouve dix guides femmes et 20 porteuses. Le chemin vers la parité sera encore long, mais l’entreprise a déjà réussi à organiser une expédition avec une équipe 100% féminine l’an dernier.
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