Reportage international

À Jérusalem, les chrétiens face à la multiplication des agressions

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Une église attaquée, un cimetière anglican profané, un commerce vandalisé... Depuis le début de l'année, les chrétiens de Jérusalem font face à de nombreuses agressions de colons israéliens ou de juifs religieux. Selon la communauté chrétienne, le discours ouvertement haineux et raciste véhiculé par l’extrême droite israélienne actuellement au pouvoir alimente ces violences.

Un juif ultra-orthodoxe passe devant une affiche de la campagne électorale montrant Itamar Ben-Gvir, député d'extrême droite israélien et chef du parti "Jewish Power", à Bnei Brak, en Israël, le lundi 24 octobre 2022.
Un juif ultra-orthodoxe passe devant une affiche de la campagne électorale montrant Itamar Ben-Gvir, député d'extrême droite israélien et chef du parti "Jewish Power", à Bnei Brak, en Israël, le lundi 24 octobre 2022. AP - Oded Balilty
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De notre correspondant à Jérusalem,

« Appelle la police ! » crie, essoufflé, le gardien de l’église de la Flagellation. La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux. On voit Majed El Resheq plaquer au sol un homme, et lutter pour le maîtriser. L’individu, un juif fanatique, vient de détruire une statue de Jésus, et répète en boucle : « Exode, chapitre 20 ». « Tu ne feras aucune idole », commande ce passage de la Bible. 

Quelques jours après l’agression, Majed est encore sous le choc. « C’était le 2 février. Ce juif extrémiste est entré dans l’église avec un groupe de touristes. Il s’est assis ici, sur ce banc. Lorsque le groupe est ressorti, lui est resté. Il a ouvert son sac, et a sorti un gourdin. Il est monté sur cette estrade, et s’est acharné sur la statue de Jésus. J’ai voulu l’en empêcher, il a alors tenté de me frapper. Avant que je ne parvienne à le stopper, il a réussi à faire tomber la statue ».

« Partez d'ici, ce n'est pas votre pays »

Brisée en deux, la statue est toujours exposée dans l’église de la Flagellation. Cette église catholique est le point de départ du Chemin de Croix, parcouru aujourd’hui par les pèlerins. La Via Dolorosa traverse la vieille ville de Jérusalem, d’est en ouest jusqu’au Saint-Sépulcre, situé dans le quartier chrétien. C’est là également que se trouve le restaurant de Miran Grégorian. Fin janvier, une trentaine de jeunes juifs ont attaqué l’établissement de ce chrétien palestinien.

« C’était un soir en fin de service, vers 23h, juste avant la fermeture, raconte le restaurateur. Ils se sont postés à l’entrée du restaurant. Ils ont d’abord commencé par nous insulter, puis à nous cracher dessus. Ils ont scandé "mort aux arabes, mort aux chrétiens, partez d’ici, ce n’est pas votre pays, retournez au Vatican". Comme si les chrétiens venaient du Vatican. Vous voyez à quel point ils sont bêtes. En réalité, c’est juste un groupe d’extrémistes ignorants, galvanisés par le discours [haineux] de leurs dirigeants. Et qui agissent, sans même réfléchir. »

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Des attaques devenues « systématiques »

Car oui, explique Miran, il y a un lien entre l’extrême droite au pouvoir, et la multiplication de ces actes anti-chrétiens. « Honnêtement, je ne veux pas politiser cette affaire. Mais notre sentiment, c’est que depuis l’arrivée de ce gouvernement d’extrême droite, ces attaques sont en train de devenir systématiques. J’ai toujours vécu ici. Et il y a toujours eu des agressions contre les chrétiens. Mais elles étaient espacées dans le temps. Là, on est à quatre ou cinq attaques depuis le début de l’année. Il y a une corrélation. Je ne dis pas que leurs dirigeants leur ordonnent directement de nous attaquer. Mais quand vous avez un ministre qui tient un discours agressif contre tout ce qui n’est pas juif, évidemment, vous finissez par avoir des groupes extrémistes qui transforment ses mots en actions ».

Des chaises fracassées, des tables brisées. La police israélienne est intervenue. Mais Miran ignore si ses agresseurs seront condamnés. « Neuf fois sur dix, on ne prévient même pas la police, car souvent, ces affaires sont classées sans suite », confie le restaurateur. 

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