Turquie: après le séisme, le temps de la reconstruction à Nurdagi
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En Turquie, à quelques semaines du scrutin, la reconstruction des villes détruites est un enjeu de campagne important pour le président sortant Recep Tayip Erdogan. Il a fait de Nurdagi détruite à 80% par le séisme du 6 février une de ses villes symboles. Les nouveaux immeubles sortent déjà de terre alors que la population peine à se remettre de la catastrophe.

De notre envoyé spécial à Nurdagi,
« C’était juste au coin… Voilà, mon appartement était exactement ici. Il y avait trois chambres les unes à côté des autres. Dans la dernière chambre, moi et ma femme, nous étions en train de dormir…» Chaque jour Mehmet Topal revient sur ce terrain vague parsemé de bout de matelas, de vêtements, de ferraille. Il ne reste plus rien de son immeuble. Il habitait au premier étage, et n’a pu sauver son fils de 18 ans, mort dans le tremblement de terre.
« Je suis en colère. Moi, je suis illettré, j’ai arrêté l’école très tôt, mais on sait tous depuis notre enfance que nous sommes sur une faille sismique. Si je construis une maison, je dois demander aux services techniques de la mairie. Alors pourquoi n’ont-ils pas vu les problèmes ? Ce n’est pas moi qui ai construit cet immeuble. C’est l’entrepreneur. Moi, j’ai seulement acheté cet appartement et c’est devenu la tombe de mon fils », déplore Memhet Topal. Lui, sa femme et son dernier fils vivent désormais dans des préfabriqués posés dans les champs autour de Nurdagi. Il attend que les nouveaux immeubles sortent de terre. À quelques kilomètres du centre, sur une colline surplombant la ville dévastée, des ouvriers travaillent sept jours sur sept.
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26 nouveaux immeubles
« Ici, nous avons deux pâtés de maisons. Ça fera au total 26 immeubles de quatre étages maximum », annonce Erdal Bal. Le chef de ce chantier financé par l’État se veut rassurant quant aux futures infrastructures : « Comme vous pouvez le voir, nous avons mis des fondations sur radier. On a commencé début mars, l’excavation est bientôt terminée. Les baguettes de fer sont connectées. Il nous reste sept mois pour tout terminer ici. Comme vous voyez, c’est un sol rocailleux, c’est le meilleur sol contre les séismes et les radiers au sol, c’est le meilleur système pour lutter contre les tremblements de terre. C’est ce qu’il y a de plus résistant, donc c’est bon. » Reconstruction à toute vitesse, mais sans les entrepreneurs locaux pointés du doigt par la population.
Le président turc Recep Tayip Erdogan est venu prononcer un discours sur ces terres il y a quelques semaines et a promis la construction de 7 045 logements en un an, rien qu’à Nurdagi. Mehmet, électeur convaincu du président sortant, veut lui faire confiance. Il espère pouvoir remettre les pieds dans un immeuble un jour : « C’est un bon sol ici, je pense que ça va aller… Mais je suis encore sous le choc… Dès que je m’approche d’un immeuble, j’ai l’impression qu’il va me tomber dessus. J’ai vraiment peur. » Sur cette colline, les quelques immeubles de logements sociaux construits dans les années 80 sont toujours debout. Quasiment intacts.
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