Reportage international

Inde: le BJP va-t-il perdre le Karnataka, son bastion au sud du pays?

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On votait ce mercredi 10 mai dans le Karnataka, cet État indien aussi peuplé que la France. Durant la campagne, les nationalistes hindous ont dû faire face à la colère d’une partie de la population et un parti du Congrès de retour dans l’arène politique.

À Bangalore, des militants du BJP le jour du vote dans le Karnataka, mercredi 10 mai 2023.
À Bangalore, des militants du BJP le jour du vote dans le Karnataka, mercredi 10 mai 2023. © Côme Bastin / RFI
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De notre correspondant à Bangalore,

Lâchers de fleurs et portraits placardés dans toute la ville… Durant tout le week-end, le Premier ministre Indien Narendra Modi a parcouru en grande pompe Bangalore, la capitale du Karnataka. L’aboutissement d’un marathon de 20 meetings en dix jours. Un électeur s’enthousiasme : « Je ne connais pas grand-chose à la politique locale, mais je vote pour soutenir Narendra Modi. On espère que Yogi Adityanath sera le prochain Premier ministre ! »

Si le BJP a sorti le grand jeu, c’est qu’à moins d’un an des élections générales, il doit à tout prix conserver une majorité au sein des 224 sièges de l’Assemblée du Karnataka. En plus d’être un des moteurs économiques du pays, c’est le seul État qu’il gouverne au Sud. Sondage après sondage, une dynamique en faveur du parti du Congrès s’est fait sentir lors de cette campagne.

« Le peuple a perdu foi dans les partis politiques. Mais en même temps, le fait qu’il se tourne à nouveau vers le Congrès montre bien qu’il voit une différence avec le BJP », déclare Rahman Khan, ancien ministre des Minorités et vétéran du Congrès au Karnataka. « Le petit marchand du coin est d’abord affecté par la hausse des prix. Nous avons donc promis de mettre l’argent dans les mains des plus pauvres pour augmenter leur pouvoir d’achat. La classe moyenne, de son côté, s’inquiète de savoir si l’Inde restera un pays démocratique », ajoute le ministre.

« Le BJP a empoisonné les esprits des citoyens du Karnataka »

Empêcher les étudiantes en Hijab d’accéder à l’éducation, interdire les restaurants hallal autour des temples, effacer la mémoire de Tipu Sultan, dirigeant local musulman du XVIIIe siècle.

En misant sur les tactiques électorales anti-musulmanes qui ont fait son succès dans certains États du Nord, le BJP a pu mobiliser sur la côte du Karnataka, où les mouvements radicaux hindous sont implantés. Mais il a peiné à convaincre dans le reste de l’État, voire a poussé certains citoyens à se réveiller, comme Lokesh Nayak, 57 ans. « Le BJP a empoisonné les esprits des citoyens du Karnataka qui est un État tolérant. »

Dans les rues de Bangalore, cet ingénieur distribue des tracts du mouvement Wake Up Karnataka, appelant à ne pas voter pour les nationalistes hindous. « Nous sommes une centaine d’organisations, de l’extrême gauche au centre droit. Cette union est une première, car la justice sociale, l’éducation et les droits humains sont attaqués comme jamais. »

Mélange des genres

Mudde Gowda, père de famille de 52 ans, affirme qu’il lâchera le BJP pour cette élection. « Les habitants du Karnataka veulent changer de gouvernement, car ces dernières années, le développement est resté au point mort. Mais il s’agit d’enjeux locaux, lors des élections générales de 2024, je pense que le soutien au BJP va continuer. »

Durant les derniers jours, les militants et les grandes figures du BJP ont insisté sur le soutien à Narendra Modi lors cette élection locale. Un mélange des genres, parfois à la limite de la menace, comme lorsque le président du parti a appelé à voter BJP pour « continuer à recevoir la bénédiction de Modi. » De quoi retourner la tendance ? Résultats le 13.

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