Joshimath, ville martyre du développement dans l’Himalaya
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Située à la frontière chinoise, dans l’État de l’Uttarakhand, la ville indienne de Joshimath voit son sol s’affaisser et ses maisons s’effondrer. Depuis quelques mois, tout s’est accéléré et plus de 2 000 personnes ont dû fuir leurs maisons. Les habitants accusent le gouvernement d’avoir fragilisé la montagne en multipliant les projets d’infrastructures.

De notre envoyé spécial à Joshimath,
À 2 000 mètres d’altitude, la ville de Joshimath fait face à des pics de roches noires enneigés, perdus dans les nuages de l’Himalaya. Un décor féerique qui contraste avec l’angoisse qui règne sur la ville. Une centaine de manifestants sont rassemblés devant la mairie. Parmi eux, Atul Sati, militant environnemental, qui est devenu une figure du mouvement Save Joshimath. « Ça a commencé en novembre 2021. Des fissures sont apparues dans quelques maisons. Et puis ça s'est répandu dans tout Joshimath. Des glissements de terrain, des routes qui s’enfoncent dans le sol. Au fil des mois, les fissures ont empiré, au moins 500 maisons se sont effondrées. Alors nous sommes descendus par milliers dans la rue pour demander au gouvernement d’agir. »
Comme beaucoup d’habitants, Atul Sati accuse notamment la NTPC (National Thermal Power Corporation), premier producteur d'électricité en Inde, d’avoir condamné Joshimath. En cause : un tunnel, construit à renforts d’explosifs dans la montagne sous la ville. « En juin 2022, trois géologues reconnus ont rendu un rapport. Le sol de Joshimath a été endommagé par les inondations de 2021, lorsqu’un glacier a cédé et balayé de nombreux projets hydroélectriques et fait 200 morts, déplore Atul Sati. La construction du tunnel a aggravé la situation. Et puis tous les travaux d’infrastructures autour de la ville. »
Des villageois contraints de quitter leur maison
Le long d’une route à flanc de terrain devenue quasiment impraticable tant elle s’enfonce dans le sol, Ashish est venu nous montrer ce qu’il reste de sa maison en contrebas. « Notre terrain s’est enfoncé de plus d’un mètre ! La maison, il n’en reste que des ruines. Même nos parcelles sont devenues impossibles à cultiver. Là, c’est le scellé des autorités disant que les lieux sont inhabitables. On a été relogés dans un ancien camp militaire, ça me déchire le cœur de quitter les lieux où j’ai grandi. »
Un peu plus loin, Rishi Devi, mère de famille de 50 ans, a elle aussi dû quitter sa maison : « Cela fait trois mois que le gouvernement nous a déplacés, mais ne fait rien pour nous. Il y a 20 ans que des études prédisaient les risques. Pourtant, la NTPC a continué à creuser des cavités sous la ville. Nous sommes effrayés pour le futur et demandons à être compensés pour ces destructions. »
Non loin de là, la ville de Srinagar commence elle aussi à s’enfoncer. Les activistes accusent la construction d’une ligne de train souterraine. Dans l’Himalaya, le dérèglement des pluies lié au changement climatique aggrave les glissements de terrain. La région de Joshimath est classée par ailleurs parmi les zones sismiques les plus à risques du monde.
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