Ahmed Rabbani, ancien détenu pakistanais de Guantanamo, réclame aux États-Unis ses œuvres
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Ahmed Rabbani a été libéré le 23 février 2023 avec son frère Abdul Rabbani, après 20 ans passés à Guantánamo. De retour au Pakistan depuis deux mois, l’artiste peintre, qui s’est révélé en détention, réclame aux États-Unis plusieurs de ses œuvres d’art réalisées lors de ses années d’emprisonnement et dans lesquelles il dénonce les tortures qu’il a subies. Ces peintures sont considérées comme une « menace pour la sécurité nationale » et ont été confisquées par l'armée américaine. Soutenu par des artistes pakistanais dans le cadre d’une exposition à Karachi qui s’est achevée le 15 mai, l’ex-détenu de Guantánamo réclame aux États-Unis la restitution de plusieurs de ses œuvres.

De notre correspondante à Islamabad,
Ahmed Rabbani pose un regard protecteur sur ses œuvres. Sept de ses peintures sont exposées dans une galerie de Karachi. Il s’arrête devant l’une d’elles réalisée, qui représente une salle aux tons gris. « J'ai passé plus d'un an ici. Cet endroit était destiné à la torture. Tout était en acier, c’était très froid. Et parfois, nous ne portions que des shorts. »
L’ancien détenu qui a passé près de 20 ans à Guantánamo, nous montre les inscriptions sur le dos de la toile. « C'est la marque de Guantánamo Bay, avec un numéro de série et un tampon “approuvé”. Au début, je n'avais pas accès aux gouaches, aux pinceaux, aux canevas. Nous avons dû nous battre pour obtenir de la peinture. Il a fallu 3, 4 ans avant qu'ils ne nous autorisent. »
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« Elles sont des parties de moi-même »
Ahmed Rabbani affirme avoir peint près de 500 œuvres au cours de son incarcération. Chauffeur au moment de son arrestation, c'est dans la prison militaire américaine qu’il découvre son talent et un moyen de survivre. « Pour moi, ce ne sont pas juste des couleurs, ce sont les tortures que j’ai subies, nos moments de tristesse, nos pleurs... Elles représentent beaucoup pour moi. Maintenant, elles sont exposées dans cette galerie, mais je refuse de les vendre. Je veux les garder comme des souvenirs de Guantánamo Bay, elles sont des parties de moi-même. »
Les États-Unis retiennent plusieurs de ses œuvres, au prétexte qu’elles constituent une menace pour la sécurité nationale. Ces œuvres décriraient la torture qu’il a subie, indique l’ancien détenu. « Si j'avais su qu'ils ne me rendraient pas toutes mes peintures, j'aurais refusé de partir. Ils m’avaient promis qu’ils me les donneraient toutes. »

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Dans l'attente d'une réponse des États-Unis
La communauté artistique a organisé une exposition intitulée « La Lune oubliée : Libérer l’art de Guantánamo » en soutient à l’artiste qui n’a jamais été jugé.
L’artiste peintre Natasha Malik est la commissaire de l’exposition. « La censure de ses œuvres d’art et le fait qu’elles soient toujours retenues à Guantánamo est inacceptable et injuste. L’armée américaine n’a aucune raison de garder ces peintures. »
À ce jour, les États-Unis n’ont jamais répondu à la requête de l’ex-détenu pakistanais.
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