États-Unis: en Louisiane, le déplacement de population lié au changement climatique a déjà commencé
Publié le :
C’est l’une conséquences majeures des changements climatiques : les déplacements de population. Plus de 200 millions de personnes pourraient être amenées à se déplacer à l’intérieur de leur propre pays d’ici à 2050. Cela a déjà commencé. Par exemple en Louisiane, dans le sud des États-Unis.

De notre envoyé spécial en Louisiane,
Pour s’approcher de l’Isle de Jean-Charles, dans le delta du Mississippi, il faut rouler vers le sud, entre les maisons endommagées ou carrément détruites par les ouragans successifs. Celles qui sont debout sont juchées sur des pilotis, de plus en plus hauts à mesure que l’on s’approche de la mer, comme celle-ci, au bord du bayou, de la rivière Pointe aux Chênes.
« Vous voulez entrer et discuter un peu ? Ne faites pas attention au chien. La maison est encore en désordre. Nous venons d’emménager il y a deux semaines ». L’homme qui nous accueille s’appelle JR Naquin. Il est le chef de la nation choctaw Jean Charles. Les Indiens de l'Isle de Jean Charles sont considérés comme les premiers réfugiés climatiques américains.
« L’ouragan Gustav a détruit notre maison. Le toit a été arraché et nous avons complètement détruit la maison et construit celle-ci. Et il y a deux ans, Zeta nous a frappés et nous avons eu quelques dégâts, mais nous n’avons pas eu à partir. Mais pour Ida, nous avons été frappés durement. Nous avons dû partir. C’était assez dur ».
« Ça brise vraiment le cœur »
Tempête après tempête, de plus en plus d’habitants de l’Isle de Jean Charles sont partis plusieurs dizaines de kilomètres au nord. Dans un endroit qu’ils appellent la nouvelle ile. JR Naquin, lui, a choisi de se reloger juste à côté, derrière une digue, un abri très relatif contre les éléments, pour rester tout près de l’ile où il a grandi. Elle a perdu 98 % de sa surface à cause de l’érosion. On peut encore y accéder par une route rectiligne, comme posée sur l’eau et souvent submergée. Il nous emmène dans son pick-up.
« Je vais m’arrêter en haut de la digue. Comme ça, vous vous ferez une idée. Vous voyez toute cette eau ? C'étaient des terres, des marais. Là aussi… Bienvenue sur l’île. Ces gens sont partis vers la nouvelle île, mais ils ont gardé leur maison ici. Ceux-ci n’ont pas bougé. Ils restent, mais oui, il y avait des maisons ici, des maisons là. Je jouais là. Je jouais beaucoup dans les bois. Ça brise vraiment le cœur. »
Une érosion qui n'est pas que naturelle
Partout, de l’eau. Mais l’érosion n’est pas seulement naturelle. Elle vient aussi de l’exploitation gazière et pétrolière. Plusieurs gazoducs traversent la zone. Les compagnies devraient reboucher les tranchées où passent les tuyaux, mais ne le font pas. L’eau s’y est engouffrée, mais JR Naquin ne leur en veut pas, et pour cause.
« J’ai travaillé pour l’une d’entre elles. Beaucoup de gens l’ont fait. Ils m’ont proposé du travail. Je l’ai pris. Pendant 33 ans. Mais qu’est-ce que vous pouvez faire ? Vous devez bien nourrir votre famille. »
Au bout de la route, dans le silence de l’île, JR Naquin admet qu’il vient pratiquement tous les jours et qu’il adorerait se réinstaller ici. Mais il est difficile de se réinstaller dans un souvenir.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne