Reportage international

[Série] La pollution des eaux du Tigre en Irak: à Bagdad, la santé des habitants en jeu [3/4]

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À Bagdad, les sources de pollution ne manquent pas. Le Tigre et ses affluents y servent d'égouts en de nombreux endroits. Une pollution des plus inquiétantes pour la santé de la population.

À Bagdad, les infrastructures de retraitement des eaux ne sont plus adaptées face à la pression démographique exercée par la population grandissante. Les eaux non traitées terminent dans les rivières affluentes du Tigre.
À Bagdad, les infrastructures de retraitement des eaux ne sont plus adaptées face à la pression démographique exercée par la population grandissante. Les eaux non traitées terminent dans les rivières affluentes du Tigre. © Marie-Charlotte Roupie / RFI
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De notre correspondante à Bagdad,

Une odeur nauséabonde envahit le sud de Bagdad. Nous sommes en face du quartier de Rustamiyah, au bord de la rivière Diyala. Des montagnes d’Iran, elle rejoint le Tigre au sud de la capitale irakienne, entrainant dans son cours des milliers de mètres cubes d’eaux usées. 

Ibrahim al-Mohalab vit sur ses berges. Il explique qu'« en tant que résidents, on ne sent plus rien, mais les visiteurs qui viennent ici, ne peuvent pas rester plus d’une heure ou deux avant de devoir partir. »

Encerclé par les mouches, c’est, selon lui, comme vivre directement dans les égouts. « Il n’y a pas de système de tout-à-l'égout, toutes les eaux usées des maisons du quartier sont jetées directement ici, et le quartier voisin dépose ses déchets là. Là-bas, vous voyez, c’est un tuyau d’évacuation. Tous les deux-trois jours, ils relâchent des eaux usées », ajoute Ibrahim al-Mohalab.

Il pointe du doigt la station d’épuration de Rustamiyah-sud, sur la rive d’en face. Mais son oncle Tahseen affirme qu’avant, l’eau ne ressortait pas si polluée. « Sous l’ancien régime, la station d’épuration fonctionnait correctement, même durant la période des sanctions », affirme-t-il. « L’eau qui en ressortait était claire. Dans les années 1990, je nageais dans l’eau et je voyais mes jambes dans l’eau transparente. Pourquoi maintenant tout est pollué alors qu’il y a tout dans le pays ? »

À écouter aussi[Série] La pollution des eaux du Tigre au Kurdistan irakien dans la région de Souleimaniye [1/4]

De vieilles installations d'épuration qui ne suffisent plus

Une partie de la réponse se trouve dans la station d’épuration. Ses installations des années 1980, toujours fonctionnelles, ne suffisent plus. La population de Bagdad a presque triplé en 40 ans.

Firas Majeed, le directeur du lieu, nous emmène près des bassins d’où l’eau traitée attend de rejoindre la rivière. « Si la capacité de notre station est de 175 000 m3 par jour, l’été, notamment, elle doit travailler à traiter 250 000 m3 ou même 300 000 m3 d’eaux usées, et si la quantité d’eaux usées dépasse les capacités de la station, il y a des débordements, environ 20 à 30% déborderont », indique-t-il. Il affirme toutefois que les taux de rejets non traités restent dans les standards sanitaires. 

Mais en parallèle, les quartiers sans raccordement aux égouts sont de plus en plus nombreux, augmentant les risques pour la santé. La famille d’Ibrahim en fait les frais : « Tous les enfants souffrent d’allergies, d’asthme. Celle-ci a un problème de cœur, et mon fils a une méningite, et celui-ci fait de l’asthme, à cause des vapeurs dégagées qu’ils respirent », dit-il.

De nouvelles infrastructures ont été promises, mais tardent à arriver. En attendant, le Tigre et ses affluents continuent de servir d’égout à ciel ouvert.

À écouter aussi[Série] La pollution des eaux du Tigre en Irak: à Kirkouk les eaux empoisonnées par les rejets pétroliers [2/4]

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