Reportage international

Suède: la sécurité sous-marine, l’objet de toutes les attentions en mer Baltique

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Un an après le sabotage des gazoducs Nord Stream en mer Baltique, les responsables n’ont toujours pas été identifiés. Tous les regards se tournaient jusqu’à maintenant vers la Russie, mais une enquête du Spiegel et du Washington Post publiée le 13 novembre est venue semer le trouble. Elle avance l'hypothèse qu'un officier ukrainien aurait joué un rôle clé. Une autre enquête est toujours en cours. Elle concerne le Baltic Connector, ce gazoduc endommagé en octobre dernier qui relie la Finlande et l’Estonie.

Des travaux de construction d'un gazoduc en mer Baltique. (Image d'illustration)
Des travaux de construction d'un gazoduc en mer Baltique. (Image d'illustration) © AP - John Randeris
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De notre correspondante à Stockholm,

Pendant la guerre froide, elle était tout simplement secrète. Aujourd'hui, elle est toujours très discrète. La base navale de l'île de Musko, à une heure au sud de la capitale, est construite sous terre. Les plus gros bâtiments de la marine suédoise entrent donc dans les DARS par deux énormes galeries creusées dans la falaise de granit. 

« C'est d'ici que nous menons presque toutes nos opérations maritimes. Notre quartier général se trouve sous cette montagne, à l'abri ». C'est devant cet immense bunker militaire, construit dans les années 1960 pour résister à une attaque nucléaire, que le chef des affaires publiques de la marine suédoise nous a donné rendez-vous. 

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« Ça fait longtemps qu'on connaît l'importance des infrastructures sous-marines, il y a beaucoup de pipelines, de câbles de communication, de câbles d'électricité qui connectent les différents pays autour de la Baltique. On sait aussi que les Russes veulent savoir où se trouvent ces câbles et les gardent à l'œil. Ce n'est rien de nouveau », explique-t-il

Sous un trafic maritime extrêmement dense, un spaghetti de câbles – comme les a qualifiés le Premier ministre suédois Ulf Kristersson – que la marine suédoise, tout comme ses homologues, n'a ni les moyens de surveiller, ni le mandat juridique pour intervenir si besoin. 

La mer Baltique, nouvelle ligne de front

« Prenons un câble estonien, par exemple. Il traverse les eaux territoriales estoniennes, puis la zone économique exclusive, puis, il entre en eaux internationales, puis dans les eaux suédoises. Nous n'avons pas le droit en temps de paix de faire quoi que ce soit si un navire suspect est stationné hors de notre zone, au-dessus d'un câble en eaux internationales par exemple. C'est un problème », précise le chef des affaires publiques de la marine.

Si pour le moment, seuls les États ont les moyens de mener des attaques sous-marines d'envergure, la faible profondeur de la Baltique rend ces infrastructures critiques plus vulnérables à des opérations de déstabilisation low cost qui peuvent s'apparenter à des accidents, plutôt qu'à des actes volontaires. 

« Les menaces hybrides sont faites de façon à ce que l'attribution d'une responsabilité soit le plus difficile possible ». Maxime Lebrun est directeur adjoint de la recherche au Centre d'excellence européen pour la lutte contre les menaces hybrides à Helsinki, en Finlande. « Il faut toujours garder en tête qu'il y a vraiment une finalité politique dans ce genre de menace, que ce soit de décrédibiliser un gouvernement ou de décrédibiliser la souveraineté de l'État en mer. C'est tout le défi de la détection de ce qu'on appelle "menace hybride" et, justement, de savoir quelle réaction y apporter. On risque de réagir trop fort, pas assez fort. »

L'attention portée aux infrastructures sous-marines dans la Baltique démontre aussi le changement de statut de cette mer presque fermée. Elle est devenue en quelques années et, surtout depuis l'accession de la Finlande à l'Otan, et bientôt de la Suède, une nouvelle ligne de front entre l'Occident et la Russie.

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