Reportage international

Jordanie: dans le camp de réfugiés palestiniens de Zarqa, le rêve chimérique du retour

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Alors qu’Israël poursuit son offensive meurtrière sur Gaza, un pays limitrophe assiste avec inquiétude et colère au conflit : la Jordanie. Depuis 1948 et la création de l’état hébreu, le royaume hachémite a reçu plusieurs centaines de milliers de réfugiés palestiniens, à tel point qu’aujourd’hui, ils représentent plus de la moitié de la population.

La Jordanie accueille plus de 2,3 millions de réfugiés palestiniens selon l’Unrwa. C'est le pays arabe qui compte le plus grand pourcentage de Palestiniens parmi sa population.
La Jordanie accueille plus de 2,3 millions de réfugiés palestiniens selon l’Unrwa. C'est le pays arabe qui compte le plus grand pourcentage de Palestiniens parmi sa population. © Christophe Ena / AP
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De notre correspondante de retour de Zarqa,

À une trentaine de kilomètres au nord de la capitale Amman, Zarqa a vu naître le premier camp de réfugiés palestiniens de Jordanie en 1949. Aujourd’hui, 75 ans plus tard, 21 000 habitants y vivent dans des immeubles vétustes.

Nasr Nasr, 53 ans, a grandi dans le camp. Il est un descendant de réfugiés venus de Jaffa en 1948, lors de la « Nakba », l’exil de 750 000 palestiniens considéré comme la grande catastrophe. Il est d’origine palestinienne et a la nationalité jordanienne. Comme l’immense majorité, il est devenu citoyen jordanien. Une situation exceptionnelle au Moyen-Orient où les palestiniens n’ont pas été intégrés dans leur pays d’accueil. « Je bénéficie de tous les droits des citoyens jordaniens, témoigne Nasr Nasr. C’est pour cela que quand on me demande qui je suis, je réponds que je suis – comme qui dirait – Jordostinien. »

Très attaché à la transmission de la mémoire, Nasr a conservé un album de photo de ses grands-parents. Il aime partager ces souvenirs avec sa fille Nowar, 22 ans. « Cette photo a été prise sur la plage de Jaffa, montre-t-il. Elle date de 1946. Toutes les photos qui sont dans cet album ont été prises par mes grands-parents. »

« Nous vivons ici en Jordanie comme dans notre seconde maison, témoigne à son tour Nowar. Ce n’est pas vraiment chez nous. C’est vrai que j’ai vécu 22 ans en Jordanie, mais je rêve de vivre en Palestine. Même si je n’y suis pas née, la Palestine reste le chemin à suivre. »

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« Nous restons des réfugiés, nous sommes comme des invités en Jordanie »

Un chemin à suivre au nom du droit au retour censé être garanti par le droit international. La Résolution 194 des Nations Unies votée en 1948 n’a depuis jamais été respectée par Israël.

En attendant, Nasr et sa fille bénéficient de tous les avantages de la nationalité jordanienne, mais d’autres sont toujours considérés comme des étrangers. Bassam el-Hawajreh est originaire de la bande de Gaza. Comme lui, 160 000 Gazaouis n’ont jamais obtenu la citoyenneté jordanienne, car ils sont arrivés dans le royaume plus tard, après la guerre des Six Jours de 1967. « Ici, nous restons des réfugiés, nous sommes comme des invités en Jordanie, rapporte-t-il. Dès qu’il se passe quelque chose en Palestine, je me sens palestinien. Quand je dois faire des papiers, je me sens comme un réfugié. »

Bloqués dans les limbes de l’administration, les Gazaouis n’ont pas le droit de travailler dans la fonction publique, pas d’accès à l’assurance maladie et doivent payer des frais bien supérieurs à leurs moyens pour faire des études universitaires.

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