Reportage international

«Nous avons peur de l'avenir»: l'inquiétude en Jordanie face à l'Unrwa en péril

Publié le :

Les États-Unis ont annoncé, vendredi 26 janvier, suspendre tout futur financement à l'agence onusienne pour les réfugiés palestiniens (Unrwa). Samedi, plusieurs pays européens - le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, et la Finlande - ont rejoint les États-Unis, l'Australie et le Canada. La Jordanie compte le plus gros quota de réfugiés palestiniens enregistrés à l’Unrwa. L’agence est aujourd’hui en péril.

Des réfugiées palestiniennes dans une classe gérée par l'Unrwa en Jordanie. Le pays compte le plus gros quota de réfugiés palestiniens enregistrés à l’Unrwa.
Des réfugiées palestiniennes dans une classe gérée par l'Unrwa en Jordanie. Le pays compte le plus gros quota de réfugiés palestiniens enregistrés à l’Unrwa. © Hussein Malla / AP
Publicité

De notre correspondant à Amman,

Depuis vendredi dernier, Abu Ahmed, 56 ans, est en proie au doute. Suite à l’annonce de la suspension du financement de l’Unrwa par les États-Unis et plusieurs pays de l’Union européenne, Abu Ahmed craint de voir la situation de sa famille encore plus se dégrader. En particulier pour ses cinq enfants, tous inscrits gratuitement dans une école gérée par l’Unrwa.

« J’ai cinq enfants et je n’ai ni travail ni salaire fixe. Ils étudient tous dans les écoles de l’agence, et s’ils ferment l’école, je ne pourrais pas les inscrire dans les écoles privées, et ils seront privés d’éducation », craint-il.

2,2 millions de personnes qui dépendent de l’Unrwa en Jordanie

Services sociaux, sanitaire ou éducation, l’Unrwa en Jordanie vient en aide à près de 2,2 millions de personnes, vivant pour une bonne partie dans 10 des 13 camps de réfugiés palestiniens installés dans tout le pays.

Pour faire fonctionner cette agence onusienne, 30 000 employés, en majorité des Palestiniens, travaillent au quotidien sur le terrain. Après l’annonce de la suspension des financements par les pays donateurs, et les accusations de participation aux attaques du 7 octobre sur des employés de l’agence à Gaza, tous ici craignent de perdre leur emploi et ont décidé de se mobiliser. L’un d’eux a accepté de s’exprimer en gardant l’anonymat.

« Rien n’est clair et nous ne pouvons rien dire pour l’instant. Ils disent qu’il n’y a pas le soutien des pays donateurs. Nous avons peur de l’avenir. Ce mois-ci, nous recevrons notre salaire, mais nous ne savons pas si nous recevrons un salaire le mois prochain », explique l’employé.

À lire aussiUnrwa: «Cette campagne doit aussi se comprendre comme une forme de punition collective de l’agence»

Tenter de maintenir un maximum de neutralité politique

Déjà soumis depuis une quinzaine d’années à des purges budgétaires par les principaux pays donateurs, l’agence onusienne se bat depuis toujours pour tenter de maintenir un maximum de neutralité politique dans son fonctionnement, punir l’ensemble de l’agence pour les écarts de quelques employés est une erreur majeure des pays donateurs, selon le chercheur Jalal al-Husseini.

« C’est comme demander à la justice française ou de n’importe quel pays de faire en sorte qu’il n’y ait aucun délit : c’est impossible », explique Jalal al-Husseini. « Par contre, il faut attraper les délinquants, et les punir. Il y a beaucoup de gens qui ont été licenciés parce qu’ils ont enfreint les règles de neutralité imposées aux fonctionnaires. L’Unrwa est un service, mais a une valeur politique importante. C’est devenu le symbole politique de l’engagement de la communauté internationale auprès des Palestiniens. » 

Avec près de 95% de ses ressources financières qui proviennent des dons, l’Unrwa est plus que jamais dépendante de ces pays pour son fonctionnement.

À lire aussiSi l’Unrwa disparaît, les Palestiniens perdent «l’un des principaux symboles de leur reconnaissance»

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes