Ces Israéliens qui continuent, malgré tout, de conduire des Palestiniens vers les hôpitaux
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Au Proche-Orient, depuis le 7 octobre, les voix qui prônent la coexistence entre Israéliens et Palestiniens sont de plus en plus rares. Mais une association caritative fait office d’exception. « Road to Recovery » – la route de la guérison en français – regroupe des Israéliens qui se portent volontaires pour conduire des Palestiniens de Cisjordanie qui ont besoin de se faire soigner vers les hôpitaux. Après cinq mois d’une guerre meurtrière, le programme continue d’exister, avec toutes ses difficultés.

De notre correspondante à Jérusalem,
Il est à peine 4 heures du matin et déjà, il y a de l’animation dans la maison familiale des Hawareeen, dans la ville de Ram, en Cisjordanie occupée.
Des sacs posés près de la porte, le thé servi, la chaise roulante pliée… C’est celle d’Amine, 6 ans, qui connait ce rituel par cœur ; un long périple jusqu’à l’hôpital de Tel Aviv où il restera un mois – avec son père – pour des séances de physiothérapie. « Avant la guerre, on partait moins tôt quand on allait à l’hôpital, ce n’était pas comme ça… C’était un peu plus simple », raconte le petit Amine.
Ce jeune garçon palestinien a un permis spécial pour se rendre en Israël et espérer retrouver, un jour, l’usage de ses deux jambes. Si son traitement est payé par l’Autorité palestinienne, le trajet ne l’est pas. Un coût exorbitant en taxi pour de nombreuses familles et un casse-tête, explique Alaa, son père, car les Palestiniens ne peuvent pas conduire de l’autre côté du mur de séparation.
« Quand nous avons rendez-vous à 8 heures, on part à 4 heures, car on ne sait jamais ce qui va se passer au checkpoint. Mais depuis qu’on a entendu parler de l’association Road to Recovery, au moins, on sait que de l’autre côté, il y a un volontaire qui nous attend. »
Un acte de co-résistance
Ce volontaire qui les emmène jusqu’à l’hôpital, ce jour, c’est Itzik Even Tzur, un retraité israélien. À la base, c’était pour rencontrer des Palestiniens, échanger et pratiquer son arabe, qu’il a rejoint l’association il y a cinq ans. Mais depuis bientôt cinq mois, dit-il, c’est presque un acte de co-résistance.
« De plus en plus de gens perdent l’espoir d’une paix. Mais nous devons aller au-delà de ce sentiment de désespoir. Car faire quelque chose, même à notre petit niveau, peut-être que c’est comme ça qu’on va aider. »
Mais l’organisation Road to Recovery a été gravement affectée : les financements sont devenus extrêmement difficiles à trouver et la plupart des volontaires habitaient dans les kibboutz autour de Gaza. Quatre bénévoles ont été tués le 7 octobre, deux sont encore retenus en otage par le Hamas.
Des trajets qui n'ont jamais cessé malgré l'attaque du Hamas
« J’ai toujours été très fière de ce que je faisais », assure Yael Noy, 54 ans, directrice de l’organisation. « Maintenant, je suis toujours fière, mais je deviens bien plus prudente quand je parle de mon travail, parce que je ne veux blesser personne. Et la situation est tellement fragile, tellement sensible, que la plupart des Israéliens ne peuvent pas l’entendre en ce moment. »
Elle le précise, les trajets vers l’hôpital n’ont jamais cessé. Dès le 8 octobre, des volontaires israéliens reprenaient la route des checkpoints. « Et la chose la plus incroyable, c’est que nous avons depuis 35 nouveaux volontaires qui nous ont rejoints après le 7 octobre. Ils nous ont dit : "Nous avons entendu parler de vous, nous voulons vous aider." Et ils ont commencé à conduire tous ces Palestiniens et ils le font très fréquemment. »
Yael et tout son groupe de bénévoles espèrent une chose : pouvoir un jour reprendre les trajets entre Israël et Gaza et revoir les familles de Gazaouis qu’ils avaient l’habitude d’aider.
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