Moyen-Orient: les rappeuses défient les codes et sont de plus en plus écoutées
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Les jeunes femmes du Moyen-Orient émergent sur la scène musicale du rap, un genre traditionnellement plutôt réservé aux hommes. Dans leurs textes, elles expriment leurs émotions, leurs rêves, leurs combats. Et si leur place dans le monde du rap se fait peu à peu, les obstacles rencontrés par ces jeunes femmes demeurent nombreux.

De notre correspondante au Caire,
Originaire de Tripoli en Libye, la rappeuse Wave, tout juste âgée de 25 ans, a dû quitter son pays pour accéder à son rêve : « Si je restais encore un mois ou deux là-bas, j’aurais été tuée… Je n’ai même jamais révélé mon visage. » Il y a encore un an, elle postait sa musique sur les réseaux sociaux depuis la capitale libyenne. Elle était menacée de mort, dans un pays où l’instabilité politique règne toujours et où le fondamentalisme religieux gagne du terrain : « Je postais ma musique sur Instagram et des gens m’ont dit : "Les femmes ne devraient pas faire du rap, seuls les hommes le peuvent", ce genre de conneries, alors je l’ai pris comme un défi. »
Wave s’accroche, malgré les menaces, malgré la désapprobation d’une partie de sa famille. Puis le studio Takwene, basé au Caire, la repère et lui permet d’émigrer en Égypte : « Cela fait presque un an que je suis en Égypte. J’ai un album qui va sortir bientôt. Cela permettra que les gens voient différemment, les femmes qui rappent. Des obstacles ? Je n’en vois plus aucun. »
Défier les traditions pour trouver du sens
Autre étoile montante de la scène rap orientale, Sagy, jeune Égyptienne de 28 ans : « J'ai le privilège d’avoir toujours été soutenue par ma famille, donc je n’ai pas de problème de ce côté. » Se lancer dans le monde du rap demeure atypique dans une société qui prône le respect des traditions et le rôle central de la famille. Difficilement compatible avec l’image qu’elle renvoie : « Par exemple, des familles vont dire : "Tu ne vas pas pouvoir te marier si tu deviens célèbre…", explique la rappeuse Sagy, quand j’ai décidé que je me fichais d’être mariée et de comment la société allait me voir tant que je faisais quelque chose qui avait du sens pour moi, je me suis lancée. »
Sa musique touche un public plutôt jeune et loin d’être exclusivement féminin. « Étonnement, 60% sont des hommes, 40% des femmes, ça va à l’encontre de tout ce que je pensais. »
Son manager, Yassin Zahran, du studio Takwene, se charge de repérer les jeunes talents féminins : « Plus nous aurons d’artistes féminines, plus libres de dire ce qu’elles veulent, plus le public les acceptera tôt ou tard. »
Selon lui, le Moyen-Orient compte seulement une trentaine de rappeuses féminines connues d’un public relativement large. Il aspire à les faire rayonner davantage.
Et pour écouter notre émission dédiée aux musiques urbaines, de Juliette Fievet, c'est par ici.
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