Au Brésil, le Mouvement des sans-terre perd ses récoltes à la suite des inondations tragiques de mai
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Au sud du Brésil, l’État du Rio Grande do Sul souffre encore des conséquences des tragiques inondations du mois de mai 2024. L’État produit 70% du riz du Brésil et la production a lourdement été affectée par les fortes pluies. Sur un des campements du Mouvement des sans-terre dans la région, plus grand producteur de riz biologique du pays, les membres du mouvement pensent à partir.
De notre envoyée spéciale dans le Rio Grande do Sul,
Au Brésil, dans la région de Porto Alegre, le Mouvement des sans-terre exploite 3 000 hectares de riz sur cinq campements. Les inondations du mois de mai ont détruit les plantations de riz, de fruits et légumes, mais aussi les machines, les tracteurs, les maisons des paysans… 420 familles ont dû quitter leurs logements dans l’urgence. Ce sont les troisièmes inondations en moins d’un an.
Dioneia Soares est la directrice de la coopérative du Mouvement des sans-terre de la région de Porto Alegre. Elle estime que 1 500 hectares de riz à récolter ont été perdus lors des inondations, sans compter le riz stocké dans les silos qui a pourri en restant trop longtemps sous l’eau. Du riz qui était déjà vendu à travers des contrats, notamment pour les cantines scolaires de la région et des métropoles de Rio de Janeiro et São Paulo. Elle témoigne : « Nous n’avons pas réussi à planter pour la saison 2023-2024 du riz dans ce qu’on appelle la "fenêtre de plantation", qui se situe entre les mois de septembre et d'octobre. Puis, nous avons encore retardé la plantation à cause des inondations au mois de novembre… Et maintenant, cette dernière inondation [en mai] nous a empêchés de récolter une grande partie de ce que nous avions planté. »
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Face à des catastrophes naturelles de plus en plus fréquentes, abandonner ses terres
Miguel Vodzik a perdu 80% de sa récolte de riz lors de la tragédie, c’est la deuxième fois en six mois que ce paysan doit tout recommencer : « On pense à partir. L’idéal serait d’obtenir de nouvelles terres. Parce que, si on compte bien, sur ces douze dernières années… S’entêter ne vaut pas le coup. Ces catastrophes seront fréquentes, alors je ne vois pas pourquoi on resterait ici », affirme-t-il. Miguel est sur ces terres depuis 1990 et se dit prêt à cultiver des terres plus petites si les conditions de culture sont meilleures et qu’elles se trouvent relativement proches de la région métropolitaine de Porto Alegre, où il pourra écouler ses stocks sur les marchés. Comme lui, la majorité des paysans du mouvement aspirent à d’autres terres aujourd'hui.
Pour Dioneia Soares, le Mouvement des sans-terre ne peut rester sur ces terres : « Nous sommes en discussion avec le gouvernement pour obtenir de nouvelles terres pour les familles du mouvement qui ont tout perdu avec ces inondations. Parce que les zones où l’on cultive du riz sont toutes en bord de rivière ou de lac… Et à en croire les experts du climat, ces tempêtes et inondations seront de plus en plus fortes. »
Selon Alvaro Delatorre, ingénieur agronome du mouvement, la culture du riz fait face à une crise sans précédent : « La nature se manifeste et il faut lui rendre ce qui lui est de droit : nous ne pouvons pas planter sur des zones de préservation environnementale, car c’est un risque. Ces zones doivent être repensées. » Entre autres facteurs, il pointe du doigt la monoculture du soja, qui selon lui participe au déséquilibre environnemental dans la région.
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