En Cisjordanie occupée, les colons s'accaparent les terres de Sinjil: «On a perdu 8 500 hectares»
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À 15 km de Ramallah, en Cisjordanie occupée, les habitants de la ville de Sinjil sont confrontés chaque semaine à des actions violentes de colons israéliens : confiscation de terres agricoles, confiscation ou destruction de maisons, oliviers arrachés à l’aide de bulldozers de l’armée. Les agressions ont augmenté depuis l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre. Et les intimidations et passages à tabac par certains soldats et colons restent le quotidien de ces citoyens palestiniens.

De notre envoyée spéciale en Cisjordanie, Fanny Léonor Crouzet
Comme chaque matin depuis quatre jours, le bruit des bulldozers israéliens résonne à Sinjil. Les habitants ont été informés par les autorités israéliennes qu’un mur de béton d’un kilomètre et demi allait bientôt être construit ici. D’un côté de ce mur, il y aurait la ville de Sinjil. De l’autre, la route 60, empruntée par les Palestiniens et les Colons. Elle coupe la Cisjordanie en deux du nord au sud.
« Ils nous isolent du monde entier ! »
Ziad Daoud est inquiet. Sa maison borde cet axe routier essentiel pour les habitants de la ville : « S'ils construisent un mur ici, on va être coupés des commerces. Et si on veut aller là-bas acheter quelques fruits, il faudra faire un détour de 7 kilomètres juste pour aller au village et revenir. S'ils finissent le mur comme ils l'ont prévu, ils nous isolent du village, ils nous isolent des membres de notre famille, ils nous isolent du monde entier ! »
L’armée avance l’argument de la sécurité pour justifier la construction du mur. Il protégerait les voitures israéliennes d’éventuels jets de pierres : « Puisque leurs excuses, c’est que les enfants jettent des pierres, pourquoi ne commencer le mur qu’ici, et laisser ma maison sans protection ? Parce que d’un autre côté, ça va permettre aux colons d’accéder à ma maison. Malheureusement, nous avons eu des problèmes avec eux. Une fois, mon père ramassait du raisin devant la maison et on lui a tiré dessus. »
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« Tu peux être tué par les autorités israéliennes »
Au sommet de la ville, perché sur une colline, Fouad observe les terres agricoles, en contrebas. Cet habitant de Sinjil parle français : « Les montagnes que vous voyez là, toutes les maisons des colons Israéliens, ici, sont construites sur des terres de Sinjil. On a perdu 8 500 hectares. Si tu accèdes à ton terrain, tu termines en prison, tu peux être tué par les autorités israéliennes. »
De l’autre côté de la route 60, dans la vallée, des drapeaux israéliens sont plantés au milieu des oliviers. Sur ces terres désormais sous contrôle de l’État hébreu, il y a la maison de famille d’Ayed. Il l’observe de loin, craignant d’être vu par le poste de surveillance de la colonie : « Après le 7 octobre, j’ai essayé d’y aller, mais on m’a mis deux fois en garde à vue. En 1940, mon père est né ici avec douze de ses frères. Notre maison a été saisie par Israël quelques années après, avec 60 hectares de terres. »
Depuis le 7 octobre, 741 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie occupée et à Jérusalem, par les forces israéliennes ou par des colons juifs, selon le ministère de la Santé palestinien.
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