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Artculture, la fonderie d’art de Noufou Sissao et Moussa Ouattara

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Pendant la 42e édition des Journées européennes du patrimoine, des lieux magiques, dont certains sont habituellement fermés, ouvrent leurs portes. L’atelier Fonderie ArtCulture de Noufou Sissao et Moussa Ouattara participe à cet évènement. Cette mise en lumière sur l’activité de fonderie d’art à la cire perdue permet à Noufou Sissao, artiste sculpteur-fondeur reconnu, de faire connaitre ses méthodes ancestrales et les technologies modernes qu’il utilise pour réaliser des œuvres d’art.

Moussa Ouattara et Noufou Sissao de l’atelier Fonderie ArtCulture.
Moussa Ouattara et Noufou Sissao de l’atelier Fonderie ArtCulture. © Maria Afonso / RFI
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Noufou Sissao est un autodidacte qui a baigné dans les connexions interculturelles. Toutes ses expériences ont enrichi son parcours artistique. Nous sommes allés à sa rencontre dans son atelier en région parisienne.  

La création, c'est une continuité. Les créations de mes premières sculptures, quand j'avais 17-18 ans, quand je les regarde aujourd'hui, par rapport à ce que je fais, c'est une continuité de la vie.

Pour Noufou Sissao, sculpteur fondeur et co-fondateur de la Fonderie ArtCulture, « la culture n'a pas de frontière ».

Il est né au Burkina Faso. Très jeune, il a commencé sa carrière dans le théâtre et le cinéma en tant que décorateur. « Entre huit et douze ans, j'étais dans mon village de naissance. Moi, j'aimais la sculpture. Mon rapport de l'enfance était avec le feu. Je voyais le feu, mais je n'avais pas le droit d'exercer ce métier de forgeron de par mon ethnie, dans le village. J'étais dans le quartier des nobles et les nobles n'avaient pas le droit d’être forgeron. Je n'ai pas eu la chance de faire ce métier. J'ai arrêté l'école en classe de troisième et je me suis dirigé dans le cinéma, parce que mon grand-oncle était un acteur fétiche de Peter Brook, le cinéaste, mon grand-oncle Sotigui Kouyaté, très connu dans le monde du cinéma et du théâtre européen et africain, vivait en Europe. Grâce à lui, je suis rentré dans le théâtre. Quand j'ai arrêté le théâtre, il fallait choisir quelque chose qui me plaisait. Le fait d'avoir été interdit dans ce métier m’a conduit à demander, par le biais de mes connaissances, à continuer dans ce métier du feu et je ne voulais pas faire de la forge, forcément. J'ai choisi la sculpture parce que le travail de sculpteur et le travail sur les décors étaient beaucoup plus propices à faire la sculpture. »

Noufou Sissao.
Noufou Sissao. © Maria Afonso / RFI

Il découvre sa passion pour la sculpture et la fonderie au cours de son enfance avec un attachement particulier pour la technique de la cire perdue. « La cire, cela me renvoie à l'enfance. Cette matière qui a un rapport avec le feu. Quand je rentre dans l'atelier, l'odeur de la cire, c'est l'envie d'avoir le rapport avec une matière, avec le feu. C'est cela qui me plaît beaucoup. À chaque fois qu'il y a une nouvelle naissance d'une œuvre, je pense à la cire. C'est une matière dont je ne peux pas m'en passer. C'est pour cela que nous disons "fonte à la cire perdue". Sans la cire, nous ne pouvons rien faire. »

Bronze à la cire perdue.
Bronze à la cire perdue. © Maria Afonso / RFI

Après avoir enseigné le modelage à Paris Atelier et œuvré dans ce secteur, notamment de nombreuses années à la Fonderie Clémenti, Noufou Sissao crée donc en 2017 avec Moussa Ouattara la Fonderie ArtCulture. « Lorsque je suis arrivé, je faisais la navette entre l'Afrique et la France. Puis, je me suis installé en 2007 en France en tant que fondeur d'art. À ce moment-là, j’ai découvert que le métier de sculpteur n’était pas celui de fondeur. Cela m’a sidéré. Pour moi, le sculpteur, il fond, il crée tout. »

Lingot de bronze.
Lingot de bronze. © Maria Afonso / RFI

« Après mon installation, je me suis rendu au Musée du quai Branly afin de découvrir l'art africain que je n'avais jamais vu. C'est un moment qui est resté dans ma mémoire. J'ai été impressionné, et cela m’a encore plus motivé à suivre mon chemin artistique et à être au service des artistes par le biais de la fonderie. »

Atelier de fonderie d'art ArtCulture.
Atelier de fonderie d'art ArtCulture. © Maria Afonso / RFI

Le processus de création d'œuvres d'art en bronze et les techniques de fonderie, notamment à la cire perdue, illustrent un savoir-faire technique et artisanal en plusieurs étapes. « Un : le moule silicone ; deux : la cire ; trois : le moule de potée ; quatre : la fusion du métal pour couler dans la pièce ; cinq : la ciselure de l'œuvre complète et enfin six : la patine. C’est plusieurs personnes qui travaillent sur une pièce par rapport à la technique ancestrale africaine, où c'est une seule personne qui fait tout le procédé. Ici, nous sommes polyvalents. Joël va faire le moulage, Didier et Pascal, eux, font la ciselure, Karim et Abou le moulage, moule de potée. Moussa lui fait essentiellement la cire. Moi, ma partie essentielle dans la fonderie, c'est la patine, plus précisément la finition de la patine sur l'œuvre. Enfin, tout le monde se rejoint pour la coulée. »

Atelier fonderie d'art ArtCulture.
Atelier fonderie d'art ArtCulture. © Maria Afonso / RFI

Que ce soit pour des projets personnels ou pour répondre à des commandes, la réflexion sur la création artistique, la recherche de l'expression personnelle sont les défis auxquels se confrontent Noufou Sissao et son équipe. Afin de promouvoir et soutenir la création artistique, il propose des solutions sur mesure. Il met à la disposition des artistes son savoir-faire et son expertise à chaque étape de la création.

« Pour l’entreprise, décrit-il, on est au service des artistes. Les artistes nous apportent leurs projets, avec leurs modèles. Nous, on regarde ce modèle, on estime le temps de travail et la prestation qu'il faut pour l'œuvre. Une fois que nous sommes tous en accord, on entame la technique de procédure de la fonderie d'art. Pendant les Jeux olympiques, nous avons rénové, place de la Concorde, douze bronzes à patiner sur place. Cela a été une de nos plus grandes réalisations. Pendant un mois et demi, avec nos chalumeaux, nous avons patiné les bronzes afin qu’ils soient parfaits pour cette période. On travaille également pour des mairies : pour la ville de Dourdan, on a réalisé le buste de De Gaulle qui se situe dans la mairie de cette dernière. D’un autre côté, lorsque l’on travaille pour un artiste contemporain dont la création n'a rien à voir avec les sculptures du passé, cela nous permet de donner de l'avenir à notre métier (notamment avec les tirages imprimante 3D). Aujourd'hui, on travaille, on collabore avec des entreprises qui nous apportent des modèles à partir des tirages imprimante 3D. On travaille également pour des designers, pour l'immobilier et pour certaines boutiques parisiennes. »

Bronze.
Bronze. © Maria Afonso / RFI

L'amour du travail, du feu, de la cire et du bronze symbolisent le parcours de Noufou Sissao et sa connexion à l'art.« C'est très difficile d’alterner entre la gestion de la vie de l'entreprise et la création. J'ai du mal à me concentrer. Pour moi, les plus beaux moments de ma créativité ont été les moments où j'avais une liberté totale de faire à 2 ou 3 heures du matin une œuvre. Celles créées durant ces moments-là ont vraiment donné de beaux résultats. Maintenant, avec la vie de l'entreprise, je me donne d'autres moments pour cela. Plus tard, je pourrai m'investir dans la vision de différents projets, les faire naître. Ce qui est le plus important, c'est de garder le métier avant de penser à soi-même pour le moment. »

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