Le sarafu, une cryptomonnaie sociale pour stimuler l'économie locale au Kenya
Publié le :
Au Kenya, l’association Grassroots Economics, soutenue depuis l’année dernière par les Croix-Rouge kényane et danoise, a lancé une monnaie virtuelle baptisée sarafu. L’idée est d'apporter un appui financier aux populations marginalisées tout en encourageant l’économie locale. Facile d’accès et d’utilisation, le concept s’est répandu dans plusieurs villes du pays.
De notre correspondante à Nairobi,
À Mukuru Kayaba, un bidonville de Nairobi, le sarafu fait désormais partie de la vie quotidienne des habitants. Cette monnaie virtuelle (1 sarafu équivaut à 1 shilling kényan) ne peut être dépensée que chez les commerçants du quartier. Dans sa petite boutique, entourée de sacs en perles, Joyce Mwikali gère ses transactions en sarafu depuis son téléphone : « Je tape “*384*96#” puis “Ok” et voilà : “Réseau Sarafu. Solde : 8803 sarafu” ».
Il suffit d’avoir un numéro de téléphone pour payer et recevoir de l’argent. À l’inscription, chaque personne reçoit l’équivalent de 30 centimes d’euros pour commencer à commercer. À Mukuru Kayaba, c’est aujourd’hui 8 000 personnes qui utilisent la monnaie sarafu de manière régulière. « Ici, tout le monde a sarafu sur son téléphone. Parfois, tu peux travailler toute la journée et ne pas réussir à gagner même 1 euro. Alors il reste les sarafu pour acheter des produits », explique Joyce Mwikali.
Un intérêt de 2% calculé sur le solde des utilisateurs est prélevé chaque mois, puis redistribué. Car plus les utilisateurs commercent en sarafu, plus ils en reçoivent. Une façon de leur fournir un revenu de base. « Le Covid-19 a fortement impacté le Kenya et les populations dans les bidonvilles de Nairobi ont été parmi les plus impactés, affirme Audilia Naomi Wanjala qui travaille pour le projet au sein de la Croix-Rouge kényane. La plupart ne pouvaient plus travailler et donc gagner d’argent pour subvenir à leurs besoins de base. Il fallait introduire un moyen leur permettant d’acheter les produits nécessaires au quotidien même en cas de manque de liquidités. C’est là qu’est intervenu sarafu. »
Les habitants peuvent ainsi s’échanger leurs biens et services sans dépendre de la monnaie nationale. Il n’est même pas possible d’échanger les sarafu contre des shillings kényans. Une contrainte pour les commerçants. « Au début, la monnaie sarafu m’a aidé à soutenir la communauté avec de la nourriture, explique Grace Wangari, derrière le comptoir de son épicerie. J’avais aussi l’habitude de faire des achats avec pour couper mes dépenses. Mais en ce moment je ne les accepte plus, car j’en ai déjà trop sur mon téléphone. Si j’accepte les sarafu, je n’aurais pas assez de shillings kényans pour payer mes producteurs au marché. »
Mais les sommes d’argent sont trop importantes pour être échangées selon la Croix-Rouge. Alors, certains commerçants ont trouvé une solution : accepter la moitié des paiements en sarafu et l’autre moitié en shillings kényans. Tous espèrent que plus de commerces rejoindront l’initiative.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne