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Soudan du Sud: les femmes des marchés de Juba durement touchées par la crise économique

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Au Soudan du Sud, la crise économique mondiale fragilise encore plus le pays, qui importe l’immense majorité de ce qu’il consomme. Cela concerne bien sûr les biens manufacturés, mais aussi les biens alimentaires importés depuis l’Ouganda. Les marchés de Juba ont toutefois leurs vendeuses de produits locaux, des produits frais qui sont cultivés sur les berges du Nil, mais ces mères de famille ne sont pas épargnées par la crise.

Une vue de la rue principale de Juba, capitale du Souda le 18 février 2022. (Image d'illustration)
Une vue de la rue principale de Juba, capitale du Souda le 18 février 2022. (Image d'illustration) AFP - -
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Dans les allées boueuses du marché de Custom à Juba, les étals sont bien fournis, mais les clients se font attendre. Christine Emmanuel Joseph tient un stand étroit où elle a soigneusement disposé de petits tas de tomates, d’oignons ou encore de citrons verts. Mais elle l’avoue : elle ne s’en sort plus.

« Les produits viennent de l’extérieur, et les prix auxquels ils sont achetés sont élevés, c’est pour ça que tout est cher ici à Juba. Une petite bouteille d’huile coûtait 400 livres (1 dollar), maintenant c’est 700 livres (1,75 dollar). Ça a augmenté en 2020. Les biens sont déjà chers quand ils sont acheminés, mais en plus avec les taxes qu’ils nous prennent, nous perdons de l’argent. Nous ne gagnons rien. »

Pour un sac de 50 kilos d’oignons, le bénéfice était de 15 dollars, il n’est aujourd’hui que de 2 dollars. « Nous ne pouvons pas augmenter nos prix, car les clients se plaignent. Ils n’ont pas d’argent pour acheter. ». Les produits alimentaires comme la farine, les fruits et légumes sont acheminés par la route depuis l’Ouganda voisin, par camions, pour subvenir aux besoins de la capitale. Une « ligne de vie » qui menace sans cesse d’être coupée par des groupes armés ou interrompue du fait de l’augmentation des cours mondiaux des biens de première nécessité comme le blé.

« Nous sommes ici pour nos enfants »

Jaqueline Lino, une cliente, résume la situation dramatique à laquelle font face la majorité des Sud-Soudanais : « Les gens pauvres au Soudan du Sud n’ont pas de quoi se nourrir. Nous en avons marre. Il y a des personnes qui n’arrivent pas à mettre leurs enfants à l’école. Il y en a qui n’ont pas à manger dans ce pays. Mon message au gouvernement, c'est qu’il faut trouver une solution pour nous sortir de là. Notre vie est dure. Moi-même je suis en difficulté. Il n’y a pas de nourriture. »

Au marché de Juba Town, Christina Belong asperge d’eau ses bottes de khudra, de korofo, de jir-jir : ces plantes consommées tous les jours dans les restaurants sud-soudanais et cultivées sur les berges du Nil. Mais avec l’augmentation du prix du carburant, même cette petite économie locale chancelle. Christina Belong s’inquiète d’autant plus que cette partie du marché dédiée aux produits locaux doit être détruite.

« Nous sommes ici pour nos enfants, pour éviter qu’ils deviennent des enfants des rues ou des criminels, pour qu’ils aillent à l’école. C’est grâce à ce travail qu’on arrive à payer l’école. »

L’instabilité qui règne à l’extérieur de la ville empêche celles qui, comme elle, aimeraient retourner au village pour cultiver. Un rêve depuis l’indépendance du Soudan du Sud en 2011 : « Il y a des gens, depuis qu’ils sont revenus de Khartoum en 2011 veulent retourner dans leur village, mais il y a des problèmes là-bas, explique Christina Belong. Ils risquent de se faire agresser, de se faire voler, de se faire chasser, même de se faire tuer, c’est pour ça que tout le monde est venu ici à Juba. Et on doit louer des logements et mettre nos enfants à l’école, tout ça, c’est grâce à ce marché. »

À Juba, les prix n’ont en fait jamais baissé depuis la pandémie de Covid-19. Selon les Nations unies, le Soudan du Sud fait face à des « conditions catastrophiques » d’insécurité alimentaire.

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