Tunisie: à Sfax, le patronat se veut optimiste malgré la crise [3/3]
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Les petites et moyennes entreprises souffrent le plus de la crise économique et de la baisse des investissements dans le pays. Or elles concentrent les ¾ des emplois. Selon une étude menée par la Banque africaine de développement et l’Institut arabe descChefs d’entreprise, près de 65% des PME ont vu leur chiffre d’affaire baisser après la pandémie. À Sfax, où la ville compte près de 71 000 entreprises, le patronat tente de rester optimiste.

De notre envoyée spéciale,
Devant le port industriel de Sfax, Khaled Sellami, président de la branche régionale de l’Institut arabe des chefs d’entreprise, parle d’un sentiment mitigé face à la situation économique du pays. Il est directeur de l’entreprise Essilor Sivo, fabricant de verres optiques. Sa société est moins touchée que d’autres par la crise grâce à l’exportation. « C’est vrai, il y a de grosses difficultés, confirme-t-il. L’État a ses propres difficultés financières qui se répercutent sur les entreprises. Il y a peut-être aussi un manque de visibilité ou un doute sur le futur, les initiatives deviennent plus difficiles. Mais jusqu’à maintenant, il y a des gens qui investissent même des gros montants. »
La ville de Sfax est faite de contrastes : le chantier d’un des plus grands centres commerciaux d’Afrique est en cours de finition, témoignant des investissements dans la ville. Le taux de chômage avoisine les 10%, l’un des moins élevés dans le pays. En même temps, l’infrastructure est à la peine. « Sfax est une locomotive qui est en panne et tout le Sud est en panne, constate Naamen Bouhamed, consultant international en PME. Mais Sfax a ce problème, c’est que les autorités tunisoises n’ont pas investi depuis ces quarante dernières années. En fait, Sfax s’est développée avec les moyens qu’elle a. »
Les investissements industriels ont baissé de 15,6% en 2022 et il y a peu de signes de reprise pour 2023. Les investissements étrangers ont baissé de 22% ces quatre dernières années. L’absence de l’État a poussé les industriels et entrepreneurs sfaxiens à une résilience, assez discrète, en misant sur un écosystème diversifié. « Vous avez des usines que ne vous ne visualisez pas, mais qui exportent pour Boeing, qui exportent pour Airbus, qui exportent dans le médical, à travers le monde entier », précise Naamen Bouhamed.
Actuellement, les entreprises restent dans l’attente d’une réelle reprise à l’échelle nationale, selon Khaled Sellami : « On vient de passer plus de dix ans d’instabilité, de changement de régime, on en est quand même à notre deuxième Constitution donc ça change très vite. Autant, c'est un message inquiétant pour l’extérieur, autant ça peut être un message politique qui dit qu’il y a de la flexibilité, il y a de la volonté de changement. »
Une volonté de changement qui reste menacée par la crise économique qui s’accentue. Le président Kaïs Saïed a déclaré le 6 avril refuser certains « diktats » du Fonds monétaire international. Ces déclarations sont perçues comme un coup d’arrêt politique aux négociations qui étaient en cours pour un prêt d’1,9 milliard de dollars avec le bailleur.
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