Côte d'Ivoire: l'agonie de la presse écrite entre chute des ventes et hausse des coûts
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En Côte d’Ivoire, les ventes de journaux ont baissé de plus de 36 % entre juin 2022 et juin 2023, selon l’Autorité nationale de la presse (ANP). Seuls deux quotidiens, Fraternité Matin et Le Nouveau Réveil, ont pu vendre en moyenne plus de mille exemplaires par jour durant le premier trimestre de l’année 2024. « Si rien n’est fait, la presse papier risque de mourir de sa belle mort », prévenait récemment la Conférence nationale des directeurs de publication.
De notre correspondant à Abidjan,
Dans le quartier chic de la Riviera Golf, Samba Sy tient un kiosque à journaux. Ce matin, comme à l’accoutumée, les clients ne se bousculent pas. Sur 200 journaux que Samba reçoit au quotidien, au moins 140 retournent chez le distributeur. L’activité tourne au ralenti. « La première difficulté, c’est le désintérêt des lecteurs parce que les ventes ont vraiment baissé, observe-t-il. Maintenant, on vend à peine 30 % des journaux qu’on reçoit. Il y a aussi souvent le retard dans la livraison des journaux, donc les gens n’achètent plus ».
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70 % de journaux invendus
Les entreprises de presse ressentent de plein fouet cette chute drastique des ventes. La plupart d’entre elles peinent à faire face à leurs charges. L’Essor Ivoirien, par exemple, fait partie de la quinzaine de quotidiens qui ont vendu moins de 500 exemplaires par jour durant le premier trimestre de l’année 2024. « Je n’ai aucune subvention, ni de l’État, ni de qui que ce soit, déplore son directeur général, Sidi Terra. J’injecte 7 millions [de francs CFA] par mois pour pouvoir imprimer ne serait-ce que 3 000 exemplaires dans le mois. Et on parle de payer les journalistes à la convention. Aucune entreprise de presse ne peut payer les journalistes à la convention puisque aujourd'hui, nous sommes dans un coma très profond ! »
La hausse de plus de 30 % des coûts d’impression des journaux, l’exigence des imprimeurs d’un paiement au comptant ainsi que les dettes fiscales accentuent les difficultés que rencontrent les organes de presse. Pour sortir de ce coma, il faut plus de soutien de la part de l’État de Côte d’Ivoire, estime Guillaume Gbato, patron du quotidien Notre Voie. « D’abord, l’annulation de toutes les dettes fiscales, toutes les dettes sociales. En plus, les subventions qui étaient données pour l’impression doivent être réinstaurées et les journalistes doivent bénéficier d’un appui direct de la part de l’État ».
Audience demandée au président Ouattara
Ces dernières années, huit journaux ont cessé de paraître, selon le régulateur, l’ANP. La Conférence nationale des directeurs de publication de Côte d’Ivoire (CNDPCI) sollicite une audience auprès du président de la République Alassane Ouattara afin de lui exposer la situation pour que des solutions soient trouvées.
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