Tunisie: un producteur d’huile d’olive face à la sécheresse et l’inflation
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La Tunisie vit depuis des mois au rythme des pénuries. Après la farine, le pain, le lait, le beurre, c’est désormais l’huile qui vient à manquer, ce qui est assez inédit dans un pays qui fait partie des plus grands exportateurs d’huile d’olive au monde. Rencontre d’un producteur tunisien, à Jendouba, dans le nord-ouest du pays, pour tenter de mieux appréhender la situation.

De notre correspondante à Tunis,
C’est en pick-up que Leith Ben Becher fait le tour de son domaine de 180 hectares. « Vous avez à droite et à gauche des oliviers. C’est encore plus beau quand les oliviers sont chargés de leurs fruits », décrit-il. Ce dandy-agriculteur d’une soixantaine d’années aime à dire que dans sa famille, on fait la cueillette des oliviers depuis 1848 au moins : « Généralement, on commence la cueillette vers mi-novembre. Cette année, j’ai commencé vers la deuxième décade de décembre. »
Seule une petite dizaine d’ouvriers s’activent ce matin, contre cinquante les années fastes. En cause, une sécheresse qui a touché tout le bassin méditerranéen et qui hypothèque la cuvée de l’année. « L’année dernière, on a fait autour de 20 tonnes d’olives, cette année, on risque de ne produire que la moitié », déplore le producteur.
Flambée des prix de l'huile d'olive
Résultat : les prix de l’huile d’olive ont bondi de 50% en un an en Tunisie. Une situation que l’exécutif prend très au sérieux. À la mi-novembre, le président Kaïs Saïed en personne convoque plusieurs ministres, dont celui de l’Intérieur. Il demande la baisse immédiate des prix.
Une huile d’olive à 15 dinars du litre – soit environ 4,40 euros au lieu des 7,40 euros du marché – est alors commercialisée. « Il a demandé, si on veut être gentil, avec insistance aux producteurs que chacun mette la main à la citerne, si je puis dire, pour apporter une sorte de contribution… "volontaire", mais obligatoire », commente le cultivateur.
Même scepticisme chez Louai Chebbi. À la tête d’Alert, une association qui vise à vulgariser les questions économiques, il suit les instructions venues d’en haut avec une grande circonspection. « J’ai l’impression que les autorités tunisiennes interviennent toujours en retard par rapport aux situations de crises. On n’arrive plus à prendre de décisions fermes, mais on fait de la communication politique autour de questions économiques réelles. On ne peut pas logiquement faire d’injonctions anti-inflation. L’inflation ne fonctionne pas comme ça. L’inflation dépend de la situation de l’offre et de la demande. Lorsqu’on ne soutient pas l’offre, la production, c’est normal de connaître des prix exorbitants. »
Contactés, ni le ministère de l’Agriculture tunisien, ni l’Office national de l’huile n’a donné suite à nos demandes d’interviews.
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