Le regain d’inflation, le nouveau casse-tête de la BCE
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En février l’inflation est repartie à la hausse en France et en Espagne. Ce rebond inattendu inquiète les marchés et plonge la Banque centrale européenne dans l’embarras.

Après trois mois de baisse continue, l’inflation serait-elle en train de repartir de plus belle en zone euro ? Ce scénario contrarie les plans de la BCE. Car si ce regain se confirme, elle devra durcir sa politique, sans casser des œufs. En clair, sans produire de la récession. Pour endiguer la hausse des prix, la BCE n’a qu’un seul outil : remonter les taux d’intérêt, mais les remonter trop fort, trop vite pourrait précipiter la contraction de l’économie de la zone euro. C’est pour éviter cet écueil qu’elle a tardé à agir l’année dernière. Son attentisme lui a été vivement reproché. Elle doit donc adopter une position ferme, en harmonie avec son mandat, qui est de garantir la stabilité des prix de la zone euro autour de +2%.
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Les faucons sont favorables à une remontée très forte des taux d’intérêt et les colombes privilégient la modération. Les premiers représentent l'Allemagne, les Pays-Bas. Une hausse forte des taux est tout à fait supportable dans leurs pays car leurs finances publiques sont plutôt bien gérées et leurs économies peuvent supporter un peu de récession. Tandis que du côté des colombes, comme la France et l'Italie, des pays très endettés, la remontée trop rapide des taux met en péril les finances publiques. La charge de la dette augmenterait les dépenses tandis que la récession ferait baisser les recettes fiscales. Hier, mardi, les bons du Trésor, les obligations françaises à dix ans, sont remontés à 3,11%, un plus haut jamais atteint depuis 2012. Le taux directeur de la BCE qui était en territoire négatif l’été dernier est aujourd’hui à 2,5%.
La Banque centrale européenne a prévu de relever son taux directeur à 3% lors de sa prochaine réunion. Cela suffira-t-il à calmer la flambée de l’inflation pronostiquée pour le mois de mars ?
La France n'échappera probablement pas à un mois de mars rouge dans les supermarchés avec des prix alimentaires qui pourraient augmenter de 10% en un mois selon les prévisionnistes. Car les effets de la politique monétaire mettent en général plusieurs mois à se faire sentir. En toute humilité Isabelle Schnabel, l’économiste allemande membre du directoire de la BCE, reconnait que si l’inflation s’est tassée en 2022 après un pic à 10% en octobre au niveau de la zone euro, ce n’est pas dû à la remontée des taux opérée à partir de juillet. C'est plutôt dû à la baisse des prix de l'énergie. Un économiste estime que l’effet maximal de la politique monétaire met parfois un à deux ans à se manifester. Mais dans un entretien à l'agence Reuters, l’économiste en chef de la BCE, l’Irlandais Philip Lane pense au contraire que c’est bien grâce à la politique monétaire menée depuis juillet que la pression est retombée. Ces différences d'approche, y compris au niveau des experts, illustrent bien la complexité des décisions à prendre.
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La Finlande est entrée en récession, cette perspective pourrait s’étendre au reste de la zone euro dans les prochains mois ?
Si les taux grimpent jusqu’à 4% d'ici à la fin de l'année comme le pronostiquent les experts, la récession va probablement gagner d’autres pays de la zone euro. Mais pas forcément en 2023. En raison du décalage dans le temps des effets produits, la récession pourrait se faire sentir, surtout en 2024.
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