Pourquoi la réindustrialisation de la France est encore incertaine
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C’est en ce moment la Semaine de l’industrie en France. Une opération séduction pour promouvoir un secteur en pleine renaissance, mais aussi confronté à de multiples défis.

Après une descente aux enfers étalée sur trente ans, l’industrie française est redevenue compétitive et dynamique. Depuis cinq ans, le nombre de créations de nouvelles usines dépasse celui des fermetures. Cette année, des milliards d'euros ont été injectés dans des projets d'usines géantes, dans la pharmacie, les batteries électriques ou les semi-conducteurs. C'est la face la plus médiatisée de la réindustrialisation.
Le mouvement est donc bien amorcé, mais il reste fragile, parce que la compétition est intense pour attirer les investisseurs, entre les pays européens. Et avec les États-Unis où les subventions, le bas prix de l’énergie aimantent les capitaux. Fragile aussi du fait du contexte économique. La hausse des taux d'intérêt pourrait compromettre les projets les plus lourds comme ceux des petites et moyennes entreprises (PME).
Décarboner
L’industrie doit aussi se réinventer avec des nouvelles priorités : la souveraineté et la décarbonation. À la faveur du Covid, le besoin de retrouver une certaine autonomie dans l'approvisionnement, et donc dans la production des biens, s’est imposée à tous. Les entrepreneurs ont aussi intégré la nécessité de décarboner leur activité.
Mais cette double injonction se heurte à des contraintes très difficiles à surmonter. D’abord le dédale des règlements administratifs qui ralentit considérablement les projets. Et c’est ensuite l’hostilité de la population riveraine qui empêche souvent l'ouverture de nouvelles usines, car l’industrie souffre encore d’une image très négative.
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Recrutement
Ce désamour entre les Français et leur industrie explique aussi les difficultés à recruter. Un comble pour un secteur qui a alimenté le chômage de masse en préférant sous-traiter ou délocaliser. Les fermetures d’usines ont détruit 2,5 millions d’emplois en France. Dans la foulée, les compétences ont disparu, les jeunes se sont orientés vers d'autres métiers. C'est pourquoi les ressources humaines manquent cruellement.
Même avec un chômage aujourd’hui supérieur à 7%, les patrons d’usines peinent à embaucher, alors que leurs besoins sont énormes. Entre les départs en retraite et les créations d’emplois engendrées par la réindustrialisation, l'industrie devra recruter 1,3 million personnes dans les dix ans qui viennent. La ville de Dunkerque, qui a vu disparaître 10 000 emplois au cours des dix dernières années, va en créer le double dans les dix prochaines années avec la vallée des batteries électriques.
Comment l'industrie s'y prend pour relever ce défi du recrutement ? Faute de trouver le personnel qualifié, les employeurs investissent dans la formation de la main-d'œuvre en provenance des services. Ils cherchent aussi à attirer des femmes, jusqu’à maintenant très peu présentes dans les usines. La main-d'œuvre étrangère fait aussi partie de la solution. Deux cent mille immigrés seront sans doute bienvenus dans les dix ans qui viennent, estime le ministre de l’Industrie, Roland Lescure.
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