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Les reptiles, mal aimés et trop aimés

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Un reptile sur cinq est menacé de disparition, selon une étude inédite de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Les serpents, lézards, tortues et autres alligators subissent partout sur la planète la chasse et surtout la destruction de leur habitat.

Un lézard, au parc C.B. Smith de Pembroke Pines, en Floride (États-Unis) en 8 mai 2019 (image d'illustration).
Un lézard, au parc C.B. Smith de Pembroke Pines, en Floride (États-Unis) en 8 mai 2019 (image d'illustration). AP - Brynn Anderson
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Adieu serpents, tortues, crocodiles... Les reptiles n'échappent pas à la sixième extinction de masse et la disparition déjà annoncée de milliers d'espèces d'oiseaux, d'insectes, de poissons ou de mammifères. Et c'est l'humain le responsable, lui qui détruit les forêts tropicales, où vit la majorité des espèces de reptiles (6 000 en tout sur la planète, 96% sont des serpents), selon l’étude de l'Union internationale pour la conservation de la nature, publiée le 27 avril. Il s’agit de la première étude d’ampleur sur l’état de leurs populations dans le monde, les reptiles ne bénéficiant pas souvent d’une très grande sympathie, comme le soulignent les auteurs…

Une mauvaise réputation infondée

Mais qui sont ces serpents qui sifflent sur nos têtes ? Le sifflement est produit par l'air qu'expulse le serpent, et il impressionne, il fait peur. Aux humains notamment. Les reptiles ont mauvaise presse, pour de bonnes et surtout de mauvaises raisons. Une étude controversée, réalisée en 2006, voulait démontrer pourquoi.

« Au cours de l’évolution des primates, sur 50 millions d’années, les serpents auraient été tellement méchants avec les primates, qu’ils ont laissé une peur gravée dans notre cerveau, résume Xavier Bonnet, du Centre d’études biologique du CNRS à Chizé. Mais nous ne sommes pas très convaincus, parce que les principaux prédateurs et dangers pour les primates sont évidemment les mammifères carnivores, bien plus que les serpents.

Quant aux serpents venimeux, qui causent effectivement pas mal de morts dans les régions agricoles, ils envoient tout un tas de signaux pour éviter la confrontation. Il n’y a donc pas vraiment de relation entre la peur des serpents et le danger qu’ils représentent. Les charmeurs de serpents se trouvent dans les endroits où il y a les serpents les plus dangereux. Et les gens ont peur des serpents dans les endroits où il n’y a aucun serpent. »

En dépit de leur rôle majeur dans l'équilibre des écosystèmes, des reptiles disparaissent parce qu'ils font trop peur. Mal aimés, ou trop aimés. Pour leur peau, ou pour leur goût. La prédation humaine fait des ravages. « Au Cambodge, le lac Tonlé Sap foisonnait de serpents. Les gens, qui les mangeaient par millions, ont fini par entraîner leur disparition, raconte Xavier Bonnet. En Chine, la consommation de toutes sortes d’animaux, des tortues en particulier, a mis des espèces au bord de l’extinction. Voire jusqu’à l’extinction. »

Quand l'habitat des reptiles disparaît

Mais la principale cause de la disparition des reptiles, c'est la destruction de leur habitat. Et en Europe occidentale, l'agriculture intensive leur fait beaucoup de mal. Une étude publiée dans les prochains jours, réalisée par le CNRS, sous la direction de Gaëtan Guillet, dans une commune de l'ouest de la France sur 20 ans, montre ainsi que 75% de la population de lézard vert a disparu. 90% même pour la vipère péliade.

« Le problème vient de l’intensification des pratiques agricoles qui sont associées à la destruction des haies, souligne Olivier Lourdais, chargé de recherche au CNRS et l’un des auteurs de l’étude. Sur les populations suivies, l’une se trouvait sur des grandes cultures, et on voit très bien que le nombre de serpents est négativement corrélé à la surface des parcelles. Dès qu’il y a la conversion à des cultures intensives, dans ce cas-là, il s’agit de maïs intensif, on a l’effondrement de la population. »

Partout dans le monde, les reptiles sont vulnérables. Et le réchauffement climatique n'arrange rien. « Une population prospère est capable de s’adapter, résume Xavier Bonnet. Pour une population fragilisée, parce que son habitat a disparu, le moindre effet supplémentaire la met à genou complètement. J’appelle ça le coup de grâce. »

Aller plus loin : l'étude de l'UICN parue ce 27 avril dans la revue Nature [Article en anglais]

À lire aussi : «Liste rouge» de l'UICN, près de 28% des espèces étudiées sont menacées

LA QUESTION DE LA SEMAINE

« Les reptiles sont-ils des animaux à sang froid ? »

Les reptiles n’ont pas le sang froid, sauf quand il fait froid. Et ils ont le sang chaud quand il fait chaud. Ils sont, et c’est le bon terme, ectothermes, incapables de produire leur propre chaleur. C’est le cas aussi des insectes et des poissons, et c’est un avantage : pas besoin d’énergie pour réguler sa température, comme les mammifères. Mais c’est aussi un inconvénient, qui oblige à hiberner quand il fait trop froid, estiver quand il fait trop chaud. Mais quelle que soit la saison, face à un reptile, il est conseillé de garder son sang-froid.

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