Guerre en Ukraine: le marché de l’uranium s’agite
Publié le :
La guerre en Ukraine et les sanctions russes rebattent les cartes de l’approvisionnement énergétique et questionnent la place du nucléaire. Un contexte qui fait grimper les prix de l’uranium.

Avec près de 40% d’augmentation au cours du premier trimestre 2022, les prix de l’uranium pour une livraison immédiate ont retrouvé les sommets délaissés depuis la catastrophe de Fukushima qui avait marqué un effondrement des cours.
Même si les contrats spots, comme on les appelle, ne représentent que 10% des transactions, ils donnent le pouls et confirment le réveil de ce marché si particulier. L’essentiel des achats se fait en effet via des contrats longs pour sécuriser les approvisionnements des centrales nucléaires. Mais entre janvier et mars, même les prix à long terme ont aussi augmenté, mais là de près de 15%.
Menace de sanctions contre le géant russe Rosatom
Plusieurs facteurs expliquent cette hausse. Les États-Unis n’ont pas écarté la possibilité de sanctions contre le géant russe du nucléaire Rosatom. L’inconnue qui pèse sur les exportations russes d’uranium peut donc expliquer le regain d’activité constaté sur les marchés ces dernières semaines. Car si la Russie n’extrait que 6% de l’uranium mondial de ses mines, elle détient en revanche 35 à 40% des capacités mondiales d’enrichissement. Et c’est précisément l’uranium enrichi qui fait tourner les centrales.
Le contexte de guerre qui pousse les pays à repenser leur stratégie énergétique pourrait faire grimper la demande en uranium et joue donc également sur les prix : des États, comme la Belgique, pour ne citer qu’un exemple, étudient la possibilité de prolonger de plusieurs années l’activité de centrales qui devaient être mises hors service initialement beaucoup plus tôt. Cette demande supplémentaire qui se profile s’ajoute à celle qui était déjà anticipée par le marché, rappelle le français Orano, et qui justifiait déjà, à elle seule, hors contexte géopolitique récent, une hausse des prix depuis plusieurs années.
► À lire aussi : Les risques de l’extraction et de l'enrichissement de l'uranium, enjeux oubliés du nucléaire
Des stocks en baisse
Si les gisements ne manquent pas dans le monde, la production insuffisante alimente, elle aussi, les prix à la hausse. En effet, « depuis trente ans, la consommation des réacteurs nucléaires est supérieure à la production », explique un expert indépendant. Jusque-là, les stocks ont permis de combler l’écart, mais cela ne durera pas s’ils ne sont pas reconstitués, prévient-il.
Des pays comme la France ont actuellement des stocks d’uranium équivalent à deux ans de production d’électricité – sur la base de 58 réacteurs en fonctionnement – selon les chiffres d’Orano, mais ce n’est pas le cas de tous les pays. Or, ces dernières années, les investissements ont été insuffisants pour répondre à la nouvelle demande qui se dessine et a fortiori pour reconstituer des stocks.
► À écouter aussi : «L’uranium de la colère»

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne