Chronique des matières premières

Les défis de l'embargo européen sur le pétrole russe

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Ce n'est encore qu'une proposition, mais l'Europe pourrait d'ici six mois arrêter d'importer du pétrole russe. Comment et avec quelles conséquences ?

Une raffinerie de pétrole dans le Tartarstan, en Russie.
Une raffinerie de pétrole dans le Tartarstan, en Russie. © REUTERS/Sergei Karpukhin
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Même si les pays européens s'y préparent, l'application d'un éventuel embargo est synonyme de multiples défis, car l'Europe était historiquement le débouché naturel des hydrocarbures russes.

En 2021, la Russie a fourni aux européens 30 % de leurs besoins en brut et 15% de leur consommation en produit raffiné, on parle en particulier de diesel dont l'approvisionnement s'annonce tendu dans certains pays. TotalEnergies prévoit d'ailleurs déjà d'en importer de sa raffinerie en Arabie saoudite.

Pour le brut, prioriser de nouvelles origines veut dire repenser les modes d'acheminement. Et faire face donc à une difficulté logistique, surtout pour les raffineries situées dans le centre de l'Europe qui étaient alimentées directement depuis la Russie par oléoduc, comme celle de Leuna en Allemagne. Il faudra aussi prendre le temps d'adapter les raffineries à traiter un autre pétrole que le russe, avec des caractéristiques de viscosité différentes par exemple.

►  À lire aussi : Pétrole: les barils russes pourront-ils être remplacés?

Un impact inévitable sur les prix

Sur le marché, mécaniquement, les prix devraient monter si l'embargo se confirme, explique Patrice Geoffron professeur d'économie à l'Université Dauphine. Notamment si ce jeudi, lors de leur réunion mensuelle, les pays de l'Opep et leurs alliés décident de ne pas accélérer leur rythme de production.

L'embargo européen pourrait aussi conforter l'existence de deux marchés, explique l'expert :  le marché russe et le non russe. Sur le premier, le pétrole se vend déjà avec une décote de 20 à 25 % aux acheteurs indiens - l'Inde a ainsi acheté deux fois plus de pétrole russe depuis le début de la guerre en Ukraine que sur toute l'année 2021. Sur le second marché, le prix va monter et difficile de dire jusqu'où.

Les pronostics de certains experts prévoient un brut qui percerait le plafond des 150 dollars le baril, voire, pour les 300 dollars si on en croit la menace de flambée des prix annoncée par le vice-Premier ministre russe, chargé de l'Énergie.

Les pays européens seront-ils solidaires ?

Entre les intentions et la mise en œuvre de l'embargo européen, il reste encore de nombreuses zones d'ombre éclaircir. Comment les volumes manquants seront répartis ? À  quel degré les principes généraux de solidarité entre pays européens seront appliqués ? Des achats groupés sont-ils prévus ? Des points qui devront être éclaircis rapidement si l'Europe veut convaincre les plus réticents de ses membres.

Pour l’heure, les pays prospectent individuellement pour diversifier leur approvisionnement. L'Allemagne a notamment annoncé avoir réduit sa dépendance au pétrole russe de 33 % environ, avant le début de la guerre, à 12%.

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