Chronique des matières premières

Le blé russe, un marché libre ou contrôlé?

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La Russie soigne ses producteurs de blé. Sans l'avoir jamais reconnu, elle aurait instauré depuis plusieurs semaines un prix plancher pour vendre son blé à l'export, un prix qui permettrait d'assurer un revenu minimum aux agriculteurs russes. 

La Russie soigne ses producteurs de blé. Sans l'avoir jamais reconnu elle aurait instauré depuis plusieurs semaines un prix plancher pour vendre son blé à l'export, un prix qui permettrait d'assurer un revenu minimum aux agriculteurs russes. 
La Russie soigne ses producteurs de blé. Sans l'avoir jamais reconnu elle aurait instauré depuis plusieurs semaines un prix plancher pour vendre son blé à l'export, un prix qui permettrait d'assurer un revenu minimum aux agriculteurs russes.  Danil SEMYONOV / AFP
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Au printemps 2023, la presse russe avait évoqué l'existence d'un prix plancher à 275 dollars la tonne de blé (hors transport). Aujourd'hui, les rumeurs font état d'un nouveau prix plancher, plus bas, à 240 dollars la tonne. Un appel d'offre public égyptien pour 55 000 tonnes de blé, passé la semaine dernière, semble le confirmer : 14 exportateurs russes se sont manifestés avec des offres toutes alignées à 240 dollars la tonne, sauf une, à 229 dollars qui a remporté le marché, selon le cabinet Inter-courtage. Mais le fournisseur audacieux qui en est à l'origine a depuis tenté de rétropédaler en revenant sur le prix cassé qu'il avait offert.

Une diplomatie du blé confuse

S'est-il fait taper sur les doigts ? C'est une possibilité, selon un cabinet français de négoce. Sa rétractation et la confusion qui en découle s'ajoute à des avertissements lancés via des canaux plus ou moins officiels : les exportateurs russes tentés de vendre leur blé trop bas s’exposent à des difficultés lors des contrôles phytosanitaires. Une menace à peine voilée qui tend à prouver elle aussi l'existence d'un marché du blé russe qui ne serait plus libre mais contrôlé. Mais pas totalement non plus car le prix du blé russe proposé à des privés est plus bas et ne semble pas être soumis à un prix fixé. Est-ce à dire que les autorités jouent sur plusieurs tableaux pour préserver des intérêts antagonistes, ceux des exportateurs, qui cherchent à remporter des appels d'offre, et ceux des producteurs qui ne veulent pas voir brader leur récolte ?

D'immenses stocks qui font baisser les prix

L'intérêt d'un prix minimum est de motiver les producteurs à produire encore autant l'année prochaine voire plus. « La récolte russe record de cette année tire inévitablement les prix vers le bas dans un marché libre », rappelle Sébastien Poncelet, directeur du développement d'Agritel. L'excédent de stock de fin de campagne qui se profile – potentiellement le double d'une année normale – alimente cette dynamique de baisse des prix. Résultat, les agriculteurs russes se retrouvent avec des prix de marché qui deviennent inférieurs à leurs coûts de production. Ce qui justifierait l'attitude de Moscou.

La stratégie russe à l'export est suivie de près par les opérateurs de la filière car « s'il existe réellement un prix plancher, la Russie étant le premier vendeur et le plus compétitif, cela crée de facto un plancher pour le prix mondial du blé » explique l'expert d'Agritel, ce qui permet aux autres origines de remonter en compétitivité.

>> À écouter aussi : Chronique des matières premières - Les Russes reprennent la main sur l'exportation de leurs céréales

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