Au Sénégal, une filière du poulet bien portante car protégée
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Au Sénégal, les importations de produits avicoles sont interdites depuis 2005. Dans une récente étude, les fondations Farm et Avril font le point. Quel bilan tirer de cette politique protectionniste ? Et si la mesure était levée ?

De notre correspondante à Dakar,
Du poulet 100% sénégalais, c’est ce que l’on trouve sur les marchés et dans les assiettes depuis plus de 15 ans. En octobre 2005, dans un contexte mondial de grippe aviaire, le Sénégal avait fermé ses frontières aux poulets importés. Une mesure justifiée par des impératifs sanitaires, mais « aussi officieusement une réponse à la hausse des importations de découpes de poulet et de carcasses de poules de réforme », indique l’étude, autrement dit des sous-produits des filières américaines, brésiliennes et européennes.
Conséquence : la filière locale a été boostée, notamment l’élevage industriel, avec des effets positifs sur l’emploi. « Selon les données de la FAO, la production de viande de poulet au Sénégal a pratiquement quadruplé » entre 2005 et 2019. Le mastodonte du secteur, l’entreprise Sedima, possède sa propre usine d’aliments de volaille. « L’aviculture est l’une des branches les plus dynamiques de l’agriculture sénégalaise », résume Matthieu Brun, directeur scientifique de la Fondation Farm. Selon les estimations, chaque Sénégalais en mangeait en moyenne 7 kilos par an en 2019, contre 3,6 kilos en 2010.
Inconvénient pour le consommateur
Mais la politique protectionniste a aussi ses limites. Côté producteurs, ils subissent la hausse des intrants comme le soja et le maïs, importés. « C’est un transfert de dépendance », note Matthieu Brun. Côté consommateurs, l’absence de concurrence contribue au prix relativement élevé du poulet, et cela « n’incite pas les producteurs à améliorer la qualité », estiment les auteurs de l’étude.
Et si les restrictions étaient levées ? « Le risque sanitaire est passé depuis longtemps », et la mesure « va à l’encontre des règles de libre-échange », analyse Awa Diouf, chercheuse au Centre de recherches pour le développement international (CRDI). Mais une réouverture brutale des frontières pourrait générer une vraie crise de la filière. Awa Diouf plaide donc pour une levée progressive, par exemple dans un premier temps pour l’importation de poulets entiers, « pour laisser aux producteurs le temps de s’adapter ».
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