Jean-Philippe Schmidt, le train a la parole (Rediffusion)
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Le camion de pompiers, on connaît, la voiture de pompiers on connaît aussi, mais les trains de pompiers, c'est beaucoup plus rare ! Ils existent pourtant et ce sont les Suisses les meilleurs experts en la matière. Comme chaque semaine de l'été, RFI part à la rencontre de personnalités du monde du transport. Direction le sud de la Suisse, pour retrouver un professionnel hors du commun. A 56 ans, Jean-Philippe Schmidt a fait carrière dans le rail, il est aujourd'hui porte-parole des CFF, les Chemins de Fer Fédéraux à Lausanne.

En train il se fait toujours avoir ! A chaque voyage il embarque des livres à dévorer pendant le trajet et bing ! Toujours la même chose, une fois assis, il passe son temps collé au paysage qui défile. Quand Jean-Philippe Schmidt vous parle, c’est très étonnant, il est pourtant porte-parole des Chemins de Fer suisses et il n’emploie pratiquement jamais le mot train, il préfère parler d’expériences.
Un blog pour faire connaître les métiers, les sabotiers du train
À 56 ans, cet ancien étudiant en littérature tient tellement à partager les variations du ciel, les couleurs dehors, les reliefs qui changent, en somme à toute la poésie d’un trajet, qu’il en écrit même un journal sur internet à titre privé.
Ce plaisir, il dit qu’il l’a toujours eu. Tout petit, comme tous les écoliers suisses, il a fait des centaines d’allers et retours. C’est là l’une des particularités helvétiques, dans ce pays montagneux, on prend le train plutôt que le bus pour aller à l’école ou rendre visite aux cousins.
En Suisse, des trajets courts à horaires fixes toute l’année
Et mis à part la maquette du train électrique de son père, rien ne reliait ce parfait bilingue anglais et latin s’il vous plait, à la grande famille des cheminots. Mais quand même, en y réfléchissant bien, le petit Jean-Philippe adorait se coller à la lucarne, chez sa grand-mère, pour observer les trains passer.
Aujourd’hui, il contribue à faire connaître cette autre particularité suisse : le train de pompier ! D’un rouge flamboyant, spécialement adapté aux tunnels.
Train de pompiers, un savoir-faire unique au monde
Et tellement efficace qu’à Balsthal dans le nord du pays, des secouristes du monde entier viennent se former à l’Institut des pompiers. Pour le volet technique, donnons la parole au porte-parole, Jean-Philippe Schmidt :
« Nous possédons 16 trains de pompiers, explique-t-il. Ils sont appelés Trains d’Extinction et de Sauvetage. Ces trains se composent de trois wagons. Le premier est un wagon-citerne avec de l’eau, de la mousse d’extinction et des lances. Le second porte du matériel et le troisième est pressurisé et réservé aux secours à l’intérieur des tunnels en cas de fumée. Nous les faisons fonctionner 24h/24h pour assurer les soins les plus efficaces et une perte de temps minimale à nos voyageurs. En vertu d’une collaboration transfrontalière, ajoute-t-il, ces trains de pompiers pourront intervenir en France, dans le département du Doubs (Jura) en cas d’accident ou de feux près des tunnels. »
Gérer les crises, c’est dire la vérité
Porte-parole, adepte de la sincérité, Jean-Philippe Schmidt n’hésite pas à reconnaître des erreurs en cas de crise ou d’accident et même de dire quand sa hiérarchie s’interroge. Il a récemment eu à gérer la communication sur une importante fuite d’acide sulfurique après le déraillement en 2015, de trains citernes de transporteurs de produits dangereux.
La Suisse, deux siècles d’industrie ferroviaire
Sur son podium, les trains japonais à l’heure au millionième de seconde près, les anglais aussi sont très bons. Comme les Suisses, les Anglais ont un passé ferroviaire sacrément épais avec des réseaux très élaborés pour lier des bourgades aux plus grandes villes avec des horaires réguliers.
Les Français méritent d’avoir un réseau pour les petites villes, avec des horaires réguliers
Les trains français ? Les TGV français ? Oui, il les admire, il a d’ailleurs son rituel, un petit café à la voiture bar qu’il ne déguste qu’une fois revenu à sa place. Ces trains à grande vitesse ont marqué les années 1980/1990, dit-il, mais à son avis, il faudrait plus de trains moyens qui rejoignent des zones reculées, c’est le cas en Suisse, les habitants des montagnes les appellent les trains à crémaillères. Explications avec Bernard Wuthrich, spécialiste du transport au journal Le Temps.
« Ces trains à crémaillères ont un système de crampons, dit-il, qui leur permettent de gravir les montagnes. En Suisse, nous avons la gare la plus haute d’Europe, la Jungfraujoch. L’entreprise qui les construit, la société Stadler, est célèbre dans le monde entier. Un fleuron de notre pays, elle vend son système à crampons, ainsi que d’autres modèles de voitures très légères en Chine, en Europe, dans le monde entier. Croyez-moi, avec Monsieur Schmidt, vous avez un bon expert, il a trente ans de carrière dans le rail, ajoute ce journaliste connaisseur du secteur transport comme de la société helvétique. Avec les Suisses, un porte-parole se doit d’être transparent parce que chez nous, les clients ne pardonnent pas ! Les Suisses sont très exigeants, ils font remarquer dès que les horaires ou les correspondances ne sont pas au niveau attendu. Il faut dire aussi que le prix des billets de train est cher, ils jouent donc bien leur rôle de consommateurs ! »
La traversée russe et la conquête de l’Amérique
Côté expérience, le couple Schmidt a déjà connu l’année sabbatique en train, avec épouse et enfants. Avec leurs deux filles, ils ont traversé l’Écosse, la France et l’Italie pour la beauté des paysages. Voilà pour le passé. Pour ce qui est de la période actuelle, monsieur Schmidt se réjouit de la jeunesse suisse, mais pas seulement; cette jeunesse du monde entier, soucieuse de l’environnement qui finit même par bannir l’avion. Ce n’est pas un porte-parole des Réseaux ferrés comme lui, qui va se plaindre du nouvel attrait pour le rail.
Et pour l’avenir ? Jean-Philippe Schmidt rêve de monter dans le Transsibérien. Puis, en rêveur bien ancré, il se donnera les moyens d’une prouesse : chevaucher les États-Unis d’Amérique par la voie ferrée.
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