Journal d'Haïti et des Amériques

«L’extrême-droite a réussi à réactiver la mémoire de la dictature Pinochet»

Publié le :

Cinquante ans après le coup d’État d’un groupe de militaires mené par Augusto Pinochet et le suicide du président Salvador Allende, une cérémonie officielle est prévue à la Moneda. Un événement organisé par le président Boric, de gauche, auquel l’opposition ne participe pas. La droite dénonce les crimes pendant la dictature, mais continue de penser que le putsch était une solution pour sortir de la crise sociale et politique en 1973.

Un manifestant brandit la photo du défunt président chilien Salvador Allende à Santiago, au Chili, le 10 septembre 2023.
Un manifestant brandit la photo du défunt président chilien Salvador Allende à Santiago, au Chili, le 10 septembre 2023. AP - Matias Basualdo
Publicité

« La droite ne veut surtout pas être associée à la figure de Salvador Allende », résume notre correspondante Naila Derroisné, en ajoutant que cette fracture existe également au sein de la société chilienne : 36% de la population pense que les militaires ont eu raison de mener le coup d’État. La situation économique actuelle et le sentiment d’insécurité fort qui règne au Chili n’est peut-être étrangère à ce sentiment et l’extrême-droite en profite pour réaliser ses meilleurs scores électoraux.

« Aujourd’hui, on voit la polarisation de la société chilienne et les ambiguïtés de cette transition démocratique »

« Nous sommes face à une mémoire en bataille, fracturée, estime l’historien Franck Gaudichaud de l’Université Toulouse-Jean-Jaurès, des secteurs de la société et du personnel politique continuent à se réclamer du coup d’État et de la dictature de Pinochet. » Les élections des dernières années ont été marquées par un nouvel essor de l’extrême-droite « qui a réactivé la mémoire de la dictature, y compris au sein des classes populaires et de la jeunesse. »

Le difficile travail de justice

Les années Pinochet ont laissé 3 000 morts ou disparus, 40 000 ont été torturées et près d’un demi-million forcées à l’exil. Après la fin de la dictature, Augusto Pinochet est resté chef des armées pendant huit ans, « il a gardé la main sur une partie de l’appareil judiciaire et il y a eu peu d’enthousiasme de la part des nouvelles autorités civiles pour avancer vers la justice, rappelle Franck Gaudichaud soulignant que les quelques procès s’étant tenus ont pu l’être grâce à la mobilisation de familles de victimes, aujourd’hui de nombreux responsables de la dictature dont décédés donc on reste dans une situation d’impunité très large. » Les choses changent aujourd’hui « parce qu’il y a une nouvelle génération qui veut en savoir plus et qui veut en terminer avec ses héritages autoritaires pour repenser la démocratie chilienne mais les enjeux sont vastes et les oppositions très importantes. »

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes