Pourquoi les oiseaux marins préfèrent-ils crotter en vol?
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Une étude insolite sur la fréquence et la quantité de déjections des oiseaux marins dans l’océan est parue le 18 août dans la revue Current Biology. Celle-ci est née d'un constat singulier : pourquoi certaines espèces défèquent-elles autant en s’envolant ?
Telle est la question que s’est posée un jeune biologiste japonais de l’université de Tokyo, spécialiste du comportement des oiseaux de mer, qui travaille notamment sur l’effort qu’ils fournissent pour voler selon la puissance du vent. En étudiant comment les oiseaux marins prennent leur envol en courant sur le sable, il a été frappé par la fréquence de leurs déjections et s’est demandé pourquoi ces animaux marins déféquaient systématiquement et autant en s’envolant.
Quel peut bien être l’intérêt biologique d’une telle production de crottes, ou plus exactement de guano lâché dans l’océan ? Pour tenter de le comprendre, avec ses collègues de l’Institut de recherche sur l’atmosphère et l’océan, il a attaché de minuscules caméras sur le ventre de 15 oiseaux marins, des puffins leucomèles (calonectris leucomelas).
Le résultat - vidéo a l’appui - est paru le 18 août dans la revue Current Biology : les puffins font leurs besoins en moyenne toutes les quatre à dix minutes, mais uniquement en vol, jamais sur le sable ou en flottant à la surface de l’eau. Les biologistes ont aussi calculé que ces oiseaux expulsaient environ 30 grammes d’excréments par heure, ce qui est énorme. Cela représente 5 % de leur masse corporelle, soit une perte de matière couteuse pour ces oiseaux.
Plus étonnant encore, les chercheurs ont constaté que la plupart des oiseaux déféquaient juste après leur envol, certains d’entre eux ne restant pas plus d’une minute dans les airs, comme s’ils avaient pris leur envol simplement pour faire leurs besoins dans l’océan. Or, comme l’explique Léo Uesaka sur le site phys.org : « Les ailes longues et étroites des puffins sont très efficaces pour planer, mais pas pour décoller. Les puffins doivent fournir un effort considérable en agitant leurs ailes pour s’envoler, ce qui est épuisant ». Il doit donc y avoir une bonne raison pour qu’ils prennent le risque de décoller pour crotter dans l’océan.
Quelles peuvent être les raisons de ce comportement ?
Les chercheurs en évoquent plusieurs, à commencer par le fait de ne pas souiller leurs plumes avec leurs déjections, mais aussi pour éviter d’attirer les prédateurs.
Mais la raison principale semble être ailleurs : c’est le moyen le plus efficaces pour fertiliser l’eau de mer. L’azote et le phosphore contenus dans les crottes de puffins sont une source de nutriment pour le plancton et toutes les espèces marines. On sait à quel point, sur Terre, le guano fertilise les côtes fréquentées par les oiseaux marins, mais on connaît mal les interactions entre leurs excréments et l’eau des océans.
Il est probable qu’ils jouent un rôle essentiel dans l’écosystème, pour le maintien de la vie sous-marine, et c’est précisément ce que Leo Uesaka veut étudier. Il va maintenant équiper les oiseaux marins de GPS et de batterie à durée de vie longue afin d’enregistrer leurs vols jusqu’en plein océan pour tenter d’établir une véritable cartographie de leurs défécations. « On n'y pense pas, mais c’est important les excréments », conclut le chercheur japonais.
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