Retour sur les intenses manœuvres diplomatiques ces jours-ci concernant le retour possible des États-Unis dans les accords de Vienne de 2015 sur le nucléaire iranien. C’est un engagement du nouveau président américain Joe Biden. A-t-on des raisons d’être optimiste sur une reprise des négociations entre Washington et Téhéran sur les accords de Vienne ?
C’est oui, avec prudence. Oui, car depuis l’élection de Joe Biden à la tête des États-Unis, le ton a radicalement changé par rapport à l’ère Trump. Avec Biden, la volonté de réintégrer les accords de Vienne est manifeste.
Mais prudence, car les modalités de ce retour américain ne sont pas encore totalement stabilisées, tant les États-Unis et l’Iran jouent pour l’instant au chat et à la souris. Chacun demandant à l’autre de faire le premier pas. Nous sommes actuellement dans cette période de tension, qui comporte une bonne dose de posture, chacun des deux pays essayant d’arriver à la table des négociations dans la meilleure position possible. Et sans faire trop de concessions à l’autre.
Un accord de 2015 fragilisé
La nouvelle administration Biden exige que l’Iran respecte à nouveau ses engagements de 2015 avant que les États-Unis ne réintègrent l’accord. En effet, depuis le retrait décidé par Donald Trump en 2018, Téhéran a peu à peu cessé de respecter certaines clauses de l’accord de 2015, en particulier dans deux domaines sensibles : la relance de l’enrichissement d’uranium à hauteur de 20 %, alors que selon le texte de Vienne, elle ne doit pas dépasser un seuil de 3,67 %, et la reprise, annoncée la semaine dernière, de la production d’uranium métal. Certains experts estiment que du coup, l’Iran serait tout prêt d’accéder au nucléaire militaire dans un délai de trois à six mois si rien ne change.
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En face, les Iraniens disent aux Américains : c’est vous qui avez fragilisé l’accord de 2015, c’est à vous de nous convaincre que vous êtes de bonne foi en annonçant d’abord que vous renoncez aux sanctions sévères contre l’Iran, qui étranglent son économie. Ces sanctions économiques américaines ont été mises en place par Donald Trump depuis 2018.
Dialogue de sourds ?
Donc, a priori, ça ressemble à un dialogue de sourds pour l’instant. Mais ce n’est pas tout à fait un dialogue de sourds. Les États-Unis viennent de faire un demi-pas vers l’Iran en annonçant la levée de sanctions internationales annoncées par Trump en septembre dernier - de manière unilatérale d’ailleurs. Ils acceptent aussi de dialoguer, aux côtés de leurs partenaires de l’accord, directement avec Téhéran. Ils vont enfin faciliter les déplacements dans New York des diplomates iraniens qui se rendent à l’ONU. La réaction de Téhéran reste inchangée pour l’instant : les Iraniens réclament toujours, d’abord, la levée des sanctions économiques de Trump.
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On en est là, on voit que ça bouge un peu. Mais ce n’est pas encore gagné, d’autant que l’Iran refuse catégoriquement une autre idée émise par certains pays, notamment Israël et l’Arabie Saoudite. Il s’agirait d’élargir les accords sur le nucléaire à deux autres domaines : le programme de missiles balistiques de l’Iran, et l’influence de Téhéran sur la région (Irak, Syrie, Liban) – le fameux axe chiite. Pour Téhéran, c’est juste impensable, pas question d’accepter une telle mise sous tutelle.
Au final, les deux pays ont potentiellement beaucoup à gagner à régler le dossier : l’Iran d’un point de vue économique – et les États-Unis d’un point de vue diplomatique. Mais pas à n’importe quel prix. Et c’est pourquoi l’équation reste aujourd’hui compliquée à résoudre.
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