Le regard d'Ahmed Newton Barry

Donald Trump en croisade pour protéger les chrétiens africains?

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Le regard de Newton Ahmed Barry porte sur le coup de colère de Donald Trump contre le Nigeria qu’il a menacé, le 2 novembre, d’une action militaire, pour protéger les chrétiens en danger. Ce qui amène à se poser la question : Trump, croisé ou d’Artagnan, des minorités persécutées en Afrique ? 

Ahmed Newton Barry.
Ahmed Newton Barry. © Anthony Ravera / Studio graphique FMM
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Il n'est probablement ni l’un ni l’autre. Quand Trump tance le Sud-Africain, Cyril Ramaphosa à propos des Afrikaners persécutés au pays de Mandela ou quand il éructe contre Bola Tinubu pour « le meurtre des chrétiens », il surréagit aux opinions de proches et des lobbies, sans prendre garde à « la complexité du réel », pour reprendre l’expression de Vincent Foucher, spécialiste des questions de conflits en Afrique.  

Une réelle persécution des chrétiens au Nigeria ?  

Les chrétiens sont persécutés dans les régions nord est, une persécution donc localisée dont le ciblage n'est pas forcément délibéré, et qui n’est pas non plus imputable à la seule violence des groupes terroristes. C’est une situation plus complexe qu’il n’y paraît.

Si on s'attarde sur les griefs mis en avant dans les propos de Donald Trump, sur la qualification des crimes, le président américain n’a pas repris le terme de « génocide », à juste titre. 

En revanche, il corrobore les estimations de l’ONG protestante « Portes ouvertes », qui a estimé qu’en 2024, 3 100 chrétiens ont été assassinés au Nigeria contre 4 476 pour le reste du monde. 

Donald Trump a pu aussi être influencé par le sénateur Texan, Ted Cruz, lobbyiste pro évangélistes nigérians, pour qui depuis 2009, 50 000 chrétiens auraient été, c’est son expression, « massacrés » au Nigeria. Ces allégations sont problématiques. 

Le gouvernement Tinubu, contre qui, un procès « en indifférence » est instruit à tort, a estimé que ces chiffres constituaient « de graves déformations de la réalité ». Une réalité complexe, que les protagonistes ne prennent pas toujours en compte. L’hostilité des groupes terroristes envers les chrétiens est réelle, mais elle n’explique pas tout. Les conflits communautaires et les conflits sur les ressources naturelles engendrent des morts, sans lien avec la religion. 

Les conséquences des propos de Donald Trump 

Ses allégations ont eu pour effet immédiat la réinscription du Nigeria sur la liste des « Countries of Particular Concern ». Le CPC, qui dresse la liste noire, annuelle, des pays qui persécutent les chrétiens. Le Nigeria en était sorti en 2021. 

Le président Tinubu, en difficulté après une tentative de coup d'État déjoué en octobre dernier et des inquiétudes d’un retour aux années de braises de Boko Haram qui refont surface, accueillerait avec soulagement un soutien américain.  À condition qu’il ne soit pas dans le format de l'opération « restore hope » en Somalie. Bola Tinubu a besoin de terminer ce mandat laborieux. 

Le gouvernement Trump I : un mauvais souvenir pour les Africains 

Donald Trump semble avoir évolué, malgré tout. De l’Afrique des « Shit hole countries » « les pays de merde », de son premier mandat aux « immigrants africains (…) les pires du monde qui viennent pour empoisonner le sang de l’Amérique », pendant sa dernière campagne, il y a eu une transmutation. Un retour en grâce de l’Afrique. 

Le 27 juin, il a imposé la signature, en l’absence du M23, d’un traité de paix au Congo Démocratique. Cette paix de « papier », ou « d’autosatifecit » de Donald Trump », comme certains ont pu la qualifier, n’est pas encore entrée en gare à Kivu, à Bukavu et à Goma. 

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