Les dessous de l'infox, la chronique

Vivek Agnihotri, réalisateur indien populaire mais qui détourne la réalité sur la Toile

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Vivek Agnihotri est réalisateur de cinéma en Inde. Il est devenu un coutumier des infox : auteur de l’un des plus grands succès du cinéma indien l’année dernière, il se vante régulièrement de recevoir de fausses récompenses, pour se faire mousser.

Le réalisateur indien Vivek Agnihotri lors d'une conférence de presse à New Delhi, mai 2022.
Le réalisateur indien Vivek Agnihotri lors d'une conférence de presse à New Delhi, mai 2022. © AFP/Money Sharma
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De notre correspondant à New Delhi,

Vivek Agnihotri est le réalisateur de The Kashmir Files, un film qui relate les persécutions et assassinats de centaines d’hindous par les séparatistes musulmans de la région du Cachemire au début des années 1990. Le cinéaste affirme que l’ampleur de ces faits a toujours été cachée par la gauche bien pensante, et que c’est en fait un « génocide » d’hindous qui s’est déroulée au Cachemire. Il présente donc The Kashmir Files comme un film militant, et les hindous comme des victimes d’un complot entre la gauche et les musulmans, destiné à ne pas révéler cette vérité. Cela lui a offert un soutien exceptionnel, logistique et idéologique, de la part du gouvernement nationaliste hindou. The Kashmir Files a toutefois été qualifié de film de propagande par le président du jury du plus grand festival international indien, du fait de sa description manichéenne des musulmans du cachemire.

S’inventer des lauriers

Le 10 janvier dernier, Vivek Agnihotri tweete que The Kashmir Files a été sélectionné pour les Oscars, et tous les acteurs choisis dans la catégorie des meilleurs acteurs, en publiant une capture d’écran tronquée où sont écrits ces noms. Cela a rapidement enflammé la toile, car Vivek Agnihotri est suivi par près de 900 000 abonnés sur Twitter. Et des messages ont commencé à fleurir pour célébrer la sélection d’un film indien aux Oscars, qui prend la défense des hindous.

La réalité est toutefois bien différente : The Kashmir Files n’a été sélectionné dans aucun jury ou public. Il se trouve seulement dans la liste d’une centaine de longs métrages qui sont éligibles aux Oscars, pour la simple raison qu’ils durent plus de 40 minutes et ont été diffusés aux États-Unis pendant sept jours.

Le cinéaste a récidivé le 21 février dernier : il annonce que son film a reçu le prix du meilleur film au festival Dada Saheb Phalke, mais a cité le prix Dada Saheb Phalke. Or les deux choses sont différentes : le festival est un événement privé, de moindre ampleur, alors que le prix du même nom est l’un des plus prestigieux. Encore une fois créant la confusion pour se faire mousser.

Des mensonges contredits

Plusieurs plateformes de vérification de l’information, comme Alt News, corrigent régulièrement les affirmations de Vivek Agnihotri. Mais cela arrive souvent des jours après ses tweets enflammés, et l’information a déjà eu le temps de circuler en boucle sur beaucoup de télévisions en continu, qui soutiennent cette cause nationaliste hindou.

Et même après ces contradictions factuelles, Vivek Agnihotri ne retire pas ses tweets, ni ne les corrige. Au contraire, il attaque : il a récemment publié un sondage, par lequel il demandait à ses abonnés de choisir ce qui est le plus dangereux pour l’humanité : les terroristes ou les vérificateurs de l’information. Un énoncé qui fait froid dans le dos.

► À lire aussi : Singapour censure un film indien stigmatisant les musulmans du Cachemire

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