Les dessous de l'infox, la chronique

La faillite de la Silicon Valley Bank instrumentalisée par la désinformation

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Après la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB) aux États-Unis, vendredi 10 mars, les banques du monde entier retiennent leur souffle face au risque de contagion. Cette crise inquiète et suscite beaucoup de désinformation sur les réseaux sociaux et dans la sphère politique américaine. Certains affirment notamment, à tort, que cette faillite serait orchestrée depuis longtemps.

Destroyed SVB (Silicon Valley Bank) logo and U.S. flag is seen in this illustration taken March 13, 2023.
Destroyed SVB (Silicon Valley Bank) logo and U.S. flag is seen in this illustration taken March 13, 2023. REUTERS - DADO RUVIC
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Un épisode de la série d’animation américaine Les Simpson, diffusé en 1995, annonçait-il déjà la faillite de la Silicon Valley Bank ? Non, c’est faux, mais c’est pourtant ce qu’avancent de nombreux internautes sur les réseaux sociaux ces derniers jours.

Comme prétendue preuve, ces derniers partagent un extrait de l’épisode en question. On y voit de nombreux habitants qui tentent de retirer leur argent en même temps à la banque, provoquant ainsi une faillite. À en croire les images, cette banque porterait le nom de la Silicon Valley Bank. Une prédiction qui, selon certains, serait la preuve d’un complot mondial autour de cette faillite.

Non, l'épisode des Simpson n'a pas anticipé la faillite de la SVB comme certaines publications l'affirment.
Non, l'épisode des Simpson n'a pas anticipé la faillite de la SVB comme certaines publications l'affirment. © Captures d'écran/ Montage RFI

Un extrait manipulé

En réalité, ce clip des Simpson partagé en ligne est manipulé. Pour s’en rendre compte, nous avons retrouvé les images originales diffusées dans le 21e épisode de la saison 6, intitulé « The PTA disbands » et diffusé en 1995. On constate alors que l’établissement concerné s'appelle « BS, First Bank of Springfield » et non pas « Silicon Valley Bank ». Voici l'extrait original.

L’auteur de cette manipulation a simplement modifié un plan fixe, en écrivant par-dessus l’image originale, pour tromper les internautes et leur faire croire que tout était écrit d'avance.

Comparaison entre l'image manipulée (à gauche) et l'image originale (à droite).
Comparaison entre l'image manipulée (à gauche) et l'image originale (à droite). © Capture d'écran/ Montage RFI

Exemple de programmation prédictive

Penser que certains événements seraient annoncés volontairement en avance dans des films ou des séries est une croyance très ancrée dans la pensée complotiste. Cela s'appelle la programmation prédictive. Plus précisément, cela consiste à croire en un complot organisé par des élites à l’échelle mondiale qui commanditeraient des événements tragiques et s’amuseraient à distiller des indices dans la culture populaire.

Ce schéma de pensée est appliqué à presque tous les événements tragiques, que ce soient les attentats, les guerres ou les épidémies. S’il existe bien des coïncidences intéressantes entre la fiction et le réel, comme c’est parfois le cas dans les séries d’animation, absolument rien ne permet d’affirmer que tout serait prédit dans le cadre d’un vaste complot mondial.

Une faillite économique, et non pas idéologique

Au-delà de la théorie du complot, des personnalités politiques américaines assurent, à tort, que la faillite de la Silicon Valley Bank serait avant tout idéologique. Selon certains républicains, c’est l'engagement de la banque en faveur de la diversité, de la parité hommes-femmes et de l'inclusion qui aurait entrainé sa chute.

Donald Trump Junior a notamment tweeté que l'effondrement de la SVB était « ce qui se passe lorsque vous poussez une idéologie de gauche ». Un discours fallacieux repris en masse sur les réseaux sociaux ces derniers jours.

Les raisons de la chute de SVB

Dans les faits, la 16e plus grande banque du pays s'est effondrée à cause de la conjonction de plusieurs facteurs. La SVB a payé le prix d'une mauvaise stratégie d'investissement et de la hausse des taux d’intérêts conjuguée à la crise de certaines start-up. La banque californienne s’est alors retrouvée avec des liquidités insuffisantes face à des retraits massifs de ses clients. On a donc ici affaire à des phénomènes économiques, et non pas idéologiques, comme certains voudraient le faire croire.

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