Série «Ralentir» en Chine: tout quitter pour ralentir
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Vivre vite, réussir vite, consommer vite : à Pékin comme ailleurs, ralentir est devenu un acte presque subversif. Mais pour certains, c’est une nécessité. Ils étaient cadres, créatifs, travaillant dans des environnements ultra-exigeants. De plus en plus nombreux à franchir le cap, ces citadins ont tout quitté pour retrouver un rythme plus doux.

Pression au travail, fatigue mentale, sentiment de vide. Certains choisissent alors de ralentir. Non pas fuir, mais vivre autrement. Tian Tian a ouvert une boutique de fleurs. Zhang est parti vivre dans un village. Deux trajectoires différentes, mais un même besoin : retrouver du sens. Entre deux assemblages de bouquets de fleurs, Tian Tian, qui a travaillé dans le marketing pendant plus de dix ans, nous raconte son déclic : « Après avoir travaillé si longtemps dans un bureau, avec la climatisation en continu, je ne savais plus s’il faisait chaud ou froid dehors. Je ne voyais plus les saisons passer. À force, j’ai eu l’impression de souffrir d’un trouble du déficit de nature. »
Et pour Zhang, ancien journaliste musical, le rythme imposé par son travail l’a poussé à changer complètement de vie : « Lors de mon dernier emploi, j’ai craqué rien qu’à l’idée de devoir demander à mon patron des congés pour partir en voyage. J’ai compris que je n’étais peut-être vraiment pas fait pour ça. »
Tous deux ressentaient un malaise. Une fatigue qui ne se dit pas, mais qui ronge. Alors, ils ont décidé de franchir le pas. « Je travaillais juste pour travailler. Il y avait un immense vide, explique Tian Tian. Aujourd’hui, je tiens une boutique de fleurs. Ce n’est pas aussi rentable, mais je me sens calme, sereine. »
Un mode de vie libre avec moins de pression
Un nouveau cap pris par Zhang également, sans regret : « C’est comme si j’avais commencé une nouvelle vie seul dans un village. Je plante des fleurs, je cuisine, je décore. Mon rythme mental, lui, a ralenti. Et surtout : je décide. Il n'y a vraiment pas besoin de se mettre en quatre pour un travail qui, honnêtement, ne paie même pas très bien. Je voulais faire quelque chose qui me plaît vraiment et avoir un mode de vie plus libre sans avoir à supporter autant de pression. »
Le rythme a changé. Moins de pression, plus de liberté. Mais aussi une autre définition de la richesse. Pour Tian Tian : « Au début, il y avait un décalage. Les gens sont toujours guidés par une sorte de système de valeurs sociales ou de conscience collective : il faut gagner plus d'argent, vivre dans une maison plus grande, conduire une meilleure voiture. Mais j’ai compris que l’abondance, ce n’est pas l’argent. C’est une joie intérieure. »
Le changement est certes matériel, mais aussi spirituel pour Zhang : « Je pense que le plus grand changement, c’est d’avoir découvert d’autres possibles en moi. Avant, je n’avais même plus le temps de lire ou de regarder un film. Aujourd’hui, ma vie est plus simple, mais plus riche. Ma relation avec le travail est très saine. Cela me pousse à apprendre beaucoup de nouvelles choses, et j'en tire également des avantages. »
Ralentir, c’est aussi remettre en question ce que la société valorise : la vitesse, la performance, le paraître. « Il faut parfois se demander : ai-je vraiment besoin de tout ça ?, ajoute Tian Tian. Est-ce que cela me rend vraiment heureux ? Dans cette quête, il faut ralentir. Accordez-vous le temps d'avoir une véritable conversation avec vous-même. Car si votre objectif est l'argent, vous vivrez inévitablement dans un état constant d'anxiété et de malaise, car vous ne verrez que l'argent. Mais si vous faites quelque chose que vous aimez vraiment, et pour lequel vous êtes doué, vous éprouverez de la joie dans le processus. »
Pour Zhang aussi, il faut se donner les moyens de ralentir : « Je pense que ralentir est inscrit dans nos gènes. Mais ça demande du courage. Le plus souvent, tout dépend de ça : franchir le pas. »
Ralentir n’est pas une pause. C’est un choix de vie, un processus, parfois fragile, mais essentiel. Ce n’est pas fuir. C’est revenir à soi. « Ralentir n’est pas une fin en soi. C’est un chemin. Trouver votre raison d’être. »
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