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Marine Le Pen et les médias: un virage?

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Comment se présidentialiser ? Depuis 2017, Marine Le Pen a opéré plusieurs virages. Programmatiques, en abandonnant la sortie de l’euro, et politiques en tentant de sortir le RN de son isolement; mais aussi médiatiques. La candidate à la présidentielle 2022 veut « déshystériser » ses relations avec les journalistes.

Marine Le Pen, invitée de Mardi politique, le 06 avril 2021.
Marine Le Pen, invitée de Mardi politique, le 06 avril 2021. © RFI
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Historiquement, les rapports entre le Rassemblement National (anciennement Front National) et les médias étaient houleux. « Parfois on ne répondait même pas à l'AFP (agence France Presse) » se rappelle un observateur. Voilà déjà plusieurs années que certains médias en font les frais. Depuis 2012, Mediapart et Quotidien (anciennement le Petit Journal) ne sont plus accrédités par le parti. Impossible pour leurs journalistes de suivre meetings et conférences de presse. Au siège de Nanterre, le DPS (service d’ordre du parti) vérifie d'ailleurs les cartes de presse à l'entrée. Une précaution sécuritaire. Une manière aussi de trier les journalistes.

En septembre 2019, c'est au tour du quotidien Libération. Échaudé par la publication d'un portrait du maire de Fréjus, David Rachline, le RN retire l’accréditation du rubricard pour couvrir l’université d’été. Face à la protestation de plusieurs rédactions, dont RFI, le parti rétropédale.

Changement de braquet depuis quelques semaines. Par l'intermédiaire de sa nouvelle conseillère presse, Caroline Parmentier, Marine Le Pen renoue par exemple avec Mediapart. Une journaliste du média en ligne se fait même accréditer le temps d'un déplacement de la présidente du RN dans les Hauts-de-France.

Un symbole alors que Caroline Parmentier revendique une volonté de « déshystériser » les rapports avec les médias. « Il faut parler à tous les journalistes » abonde un candidat aux régionales. Mais à une condition :  qu'ils soient « loyaux », selon le terme de Marine Le Pen début avril devant la presse parlementaire.

Peut-on pour autant parler d'un virage?

Une certitude du côté du RN : après la dédiabolisation, la normalisation passe par un nouveau rapport avec les médias. « On veut corriger le tir » explique un conseiller. Mais le défi est de taille. Lors de la dernière campagne municipale, il est arrivé que des journalistes reçoivent des SMS, coups de téléphone ou tweets accusateurs concernant leur couverture. Qu'ils travaillent pour la presse nationale, locale ou internationale. RFI en a aussi fait les frais.

Si Marine Le Pen veut renouer avec la presse, elle assure aussi que les médias ont changé à son égard. « Après avoir été traitée comme un diable, ça s’est arrangé » disait-elle il y a quelques jours devant un parterre de journalistes. Même ressenti du côté de Jordan Bardella, numéro 2 du parti. « Nous sommes le premier parti de France, cela crée une forme de respect. Et puis nous sommes donnés à 46,47,48% au second tour, cela aussi ça change tout », veut croire Caroline Parmentier.

Autre atout dans la poche du RN : l'émergence de médias à la ligne éditoriale plus proche du parti. « Les médias étant de plus en plus clivants, cela nous donne un nouvel espace » décrypte un rallié. L'Incorrect, dans lequel Marine le Pen vient de tendre la main à la droite ; Cnews, qui offre chaque soir une tribune à Eric Zemmour, « une chaîne qui travaille dans notre sens » se félicite un cadre; ou encore Valeurs Actuelles à qui Marine Le Pen parlait la semaine dernière sur un ton qu'on lui connait peu de ses enfants, de son rôle de mère ou encore de son rapport à son père. « On a beaucoup de demandes sur le mode personnel » s'enthousiasme son équipe qui scrute toutefois à la loupe le travail de reporters perçus comme « militants » quand ils continuent de placer le RN à l'extrême droite.

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