Reportage Afrique

Eswatini [2/3]: faire partie de l'opposition dans la dernière monarchie absolue d'Afrique

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Deuxième volet de notre série qui s’intéresse au royaume d’Eswatini, ex-Swaziland, dernière monarchie absolue d’Afrique. Le roi Mswati III, au pouvoir depuis 35 ans, règne sans partage sur le pays. Il est libre de choisir son Premier ministre et de nommer les juges. Quant aux partis politiques, ils sont officiellement bannis depuis 1973. Ils ne peuvent pas participer aux élections parlementaires, où seuls des individus peuvent se présenter sur leurs mérites personnels. Mais des mouvements d’opposition s’organisent malgré tout dans le pays, protégés par la liberté d’association.

Sibongile Mazibuko, la présidente du Ngwane National Liberatory Congress.
Sibongile Mazibuko, la présidente du Ngwane National Liberatory Congress. © Claire Bargelès / RFI
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Faire partie de l’opposition au pouvoir royal en Eswatini peut se révéler très risqué. Ncamiso Ngcamphalala, secrétaire général de la branche locale des Combattants pour la liberté économique (EFF), en sait quelque chose : « Nous devons traverser beaucoup de choses. Par exemple, j’ai été arrêté pour le crime de "sédition". Je suis resté en prison environ deux mois. En Eswatini, on peut être poursuivi en justice pour tout et n'importe quoi, surtout si l’on est un militant politique ».

Et la répression continue depuis le début des manifestations pro-démocratie : deux députés sont en prison, depuis juillet, au titre de la loi sur le terrorisme.

« Un système géré par une famille »

C’est cette même loi qui classe l’un des plus importants partis d’opposition, le PUDEMO, comme organisation terroriste. Wandile Dludlu en est le secrétaire général : « Nous sommes un mouvement souterrain, et nous agissons en défiant le pouvoir en place. Le système politique, qui s’appelle "Tinkhundla", instaure la suprématie royale dans tous les domaines, par les institutions de la monarchie. Les pouvoirs exécutifs, législatifs et judiciaires reposent entre les mains du palais royal. Le roi gère son gouvernement grâce à des conseillers choisis par ses propres soins. Finalement, c’est un système géré par une famille ».

La même colère anime Sibongile Mazibuko, présidente du Ngwane National Liberatory Congress, l’un des plus anciens partis du pays. Du haut de ses 66 ans, elle reçoit les visiteurs dans sa maison modeste et continue à élaborer des stratégies pour faire survivre sa formation : « Il est possible de se retrouver et de s’organiser si l’on se réunit dans des lieux gérés par le secteur privé. Par exemple dans les villes, là où les gens louent des salles, car pour nous atteindre il faudrait violer les droits des hommes d’affaires que l’on aura payés. Mais pour cela, il faut de l’argent, et comme 63 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, il est très difficile de collecter des cotisations ».

Les partis d’opposition réclament désormais la libération de tous les prisonniers politiques, arrêtés depuis les manifestations de juin.

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