En Côte d'Ivoire, des voix s'élèvent contre la chasse au miel sauvage
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Profitables à l’agriculture, en raison de leur rôle dans la pollinisation des espèces végétales, les abeilles sont toutefois menacées en Côte d’Ivoire. En cause : la déforestation, les insecticides, mais aussi de vieilles pratiques artisanales de récolte du miel, ou de la cire.

Avec notre envoyé spécial à Korogho, François Hume-Ferkatadji
À Waraniéné, dans le fameux village d’artisans-tisserands, à quelques encablures de Korhogo, un vendeur de pagnes tissés sort une bouteille en plastique contenant un épais liquide brun. « Nous appelons ça du miel sauvage, c'est-à-dire que ce n'est pas de l'apiculture, explique-t-il. Directement récupéré dans les troncs d'arbre, ou même dans les termitières délaissées où les abeilles peuvent venir se mettre là et faire des essaims et du miel. Si ça dure deux ans, un an, on peut déjà faire la récolte. C'est du miel purement sauvage, naturel. »
Konaté Salif pratique la récolte du miel sauvage depuis son adolescence, malgré les risques, sans protections, les piqûres sont nombreuses. « 18h, 19h, tout est là en brousse. Maintenant, tu commences à récolter ton miel, mais avec du feu, tu chasses les abeilles, un peu, elles vont s'entasser en haut et tu commences à récolter ton miel, parce que les abeilles n'aiment pas la chaleur. »
Problème : cette méthode de récolte par le feu est extrêmement mauvaise pour les colonies d’abeilles ainsi décimées. « Ça tue beaucoup d'abeilles, et le lot d'abeilles que ça tue, on ne peut pas le chiffrer. Vraiment, ça gâte les abeilles », regrette Konaté Salif.
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Dafoungo Koné, professeur et ingénieur agronome à l’université Gon Coulibaly de Korhogo lance l’alerte : « Bien sûr il faut décourager cette pratique, elle ne permet pas le maintien de la colonie d'abeilles. En fait, la charge en miel conduit à la destruction de la colonie d'abeilles dont le miel est récolté. De plus, elle conduit, généralement, à l'obtention d'un miel de qualité médiocre. Les récoltes sont souvent précoces et le miel ainsi obtenu a un taux d'humidité élevé, d'un indice supérieur à 20%. Par ailleurs, l'usage du feu lors de la récolte contribue à laisser des débris et de la suie dans le miel. »
Ali Coulibaly, jeune apiculteur de la région, souhaite, lui, mettre en place des actions de sensibilisation à travers une nouvelle organisation, l’Association des apiculteurs du Grand Nord. « J'ai plus besoin que les moyens pour pouvoir former certaines personnes qui le font et même les sensibiliser. Les sensibiliser et leur faire comprendre que l'on peut utiliser une autre technique de capture, avoir en quantité le miel et ne pas tuer les abeilles pour qu'elles puissent coloniser nos champs, pour qu'on puisse avoir de grandes récoltes au niveau de nos denrées. »
En Côte d’Ivoire, on compterait une centaine de coopératives d’apiculteurs, mais avec moins de 100 tonnes par an, la production reste très faible par rapport à l’Éthiopie, la Tanzanie, ou encore la République centrafricaine, qui produit environ 16 200 tonnes par an.
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