Reportage Afrique

Un bébé à tout prix [4/4] Ouganda: une association pour venir en aide aux mères endeuillées

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Comment faire le deuil d’un bébé qu’on n’a pas eu la chance de prendre dans ses bras, dans un pays où rien qu’aborder le sujet est défendu ? En Ouganda, l’association Vessel is Me aide les mères qui ont perdu leur enfant pendant leur grossesse ou leur accouchement. Reportage à Kampala, Lucie Mouillaud.

En Ouganda, L'association Vessel is me vient en aide aux mères endeuillées.
En Ouganda, L'association Vessel is me vient en aide aux mères endeuillées. © https://www.instagram.com/vessel_is_me/
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De notre correspondante à Kampala, 

Sur le portail vert, aucun panneau n’indique la présence de l’organisation afin de préserver l’intimité des mères endeuillées, parmi elles, Rachel Akugizibwe. Quand son bébé est décédé juste après sa naissance, la jeune femme a été choquée par la réaction du personnel soignant.

« Tout le monde rentrait et sortait directement de ma chambre. La manière dont on m’a annoncé la nouvelle n’était pas du tout professionnelle. C’est une infirmière, que je n’avais pas encore vue qui m’a dit en premier que mon bébé était mort à 5 heures du matin et le médecin n’est venu me voir qu’à 11 heures. Quand j’ai insisté pour voir mon bébé, on a essayé de m’en décourager. Il faut vraiment former les gens sur les manières dont on délivre une telle information », confie-t-elle. 

Après cette épreuve, Rachel s’engage auprès de Vessel is Me, pour aider les mères qui, comme elles, ont perdu leur bébé pendant la grossesse ou l’accouchement. L'objectif est de les accompagner dans leur deuil, souvent négligé par leurs proches.

« À moins d’avoir été dans cette situation, personne ne peut comprendre. On nous dit qu’on aura un autre bébé, mais il ne remplace pas celui qu’on a perdu. Les mères nous racontent ce que leur belle-famille leur a dit. Il y a des insultes et toute sorte de choses. Il y en a peu qui ont été soutenues par leur belle-famille », nous raconte Rachel 

C’est pour briser ce tabou que Denise Kekimuri, fondatrice de l’association, a écrit un livre pour mettre en avant les difficultés auxquelles sont confrontées les mères après la mort de leur bébé.

« Il n’y avait pas de procédure, rien du tout, les femmes sortaient de l'hôpital seules, sans rien. Et l’importance de la thérapie n’était pas mise en avant pour ces situations. Alors avoir un vrai plan en cas de mort périnatale, avoir une feuille de route qui puisse aider les femmes est très important », explique-t-elle.

Depuis, pour pallier le manque de prise en charge, l’association organise des thérapies collectives, des formations pour le personnel soignant et un accompagnement des femmes pendant leur deuxième grossesse. L’idée, pour Denise Kekimuri, est de changer le rapport à la maternité.

« Que les bébés soient présents physiquement ou non, ce sont des mères. Je demande souvent aux gens, à quel moment une femme devient mère, ce qu'est la maternité pour eux. Est-ce quand le bébé est là et qu’il grandit ? Nous disons toujours aux mères d’anges qu'elles sont des mères », nous explique Denise Kekimuri.

Chaque année, le premier dimanche du mois de mai, les membres de l’association se retrouvent pour célébrer la Journée internationale des mères endeuillées.

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