Le compte à rebours est lancé pour le procès du massacre du 28 septembre
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En Conseil des ministres le 14 juillet dernier, Mamadi Doumbouya a chargé le Garde des Sceaux d’organiser le procès du 28 septembre 2009. Pour la première fois, les autorités guinéennes se donnent une date butoir : les audiences doivent commencer avant le prochain anniversaire du massacre*. Après 13 ans d’un processus en dents de scie, marqué par les hésitations et la mauvaise volonté de certains responsables, l’espoir renaît enfin chez les victimes. Mais le tribunal – toujours en travaux – et le risque de voir certains accusés échapper à la procédure nourrissent encore les doutes.

De notre correspondant à Conakry,
Deux étages, une façade encore couverte d’échafaudages. La pluie tombe sur le tribunal ad hoc. « Ça a bien avancé, moi, je ne pensais pas qu'ils étaient à ce niveau et ça fait plaisir parce qu'on a attendu ce moment depuis 13 ans », confie maître Alpha Amadou DS Bah. Sur le chantier, l'avocat des victimes, croise le coordinateur des travaux. « Nous sommes venus, on a la chance de vous trouver ici, est-ce que ce bâtiment sera livré pour que le procès s'ouvre en septembre prochain ? », lui demande-t-il.
« On a deux grandes salles à équiper, notamment la salle du rez-de-chaussée et la salle du 2e et du 1er étage », lui répond-il. « Donc, on a un délai quand même assez restreint pour les deux mois, parce que le temps de faire la livraison, de recevoir et puis l'installation... »
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Reste une option, en cas de retard : utiliser le bâtiment de la Cour d’appel, qui se trouve juste à côté. « Au pire des cas, pour que ça s'ouvre, pourquoi pas ? », estime maître Alpha Amadou DS Bah. « Si c'est la Cour d'appel qui est retenue, on ne s'opposera pas. Je pense que c'est une piste. On en a parlé avec le Garde des Sceaux, mais il n'avait pas évoqué cette possibilité. »
Une autre inconnue : Moussa Dadis Camara sera-t-il dans le box des accusés ? Le 28 septembre 2009, l’opposition se rassemblait pour dénoncer la possible candidature à la présidentielle de celui qui était alors le chef de la junte.
« Le ministre de la Justice nous a rassurés que tous les accusés dans ce procès seront à l'audience au moment de l'ouverture », précise l'avocat des victimes.
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Sur le chantier, il y a aussi Asmaou Diallo. Son association, l’Avipa, représente une partie des centaines de victimes du massacre. « Le 28 septembre, j'ai perdu mon fils aîné. C'est depuis lors que je me suis engagée dans ce combat pour savoir pourquoi ils ont envoyé les militaires pour massacrer les gens », raconte-t-elle. « On vient d'avoir l'information que le procès aura lieu, alors on se réjouit sur ça, mais nous attendons de voir. »
Asmaou Diallo reste méfiante. En 13 ans, il y a eu beaucoup trop de déceptions. « On a perdu beaucoup, beaucoup de victimes. Par exemple, quand je prends quelques membres du bureau, il y en a d'autres qui ont préféré arrêter parce que ce n'était pas facile. Pour eux, le combat était vraiment très rude. À chaque fois, on vous promet, rien n'est prêt... » La présidente de l’Avipa demande aujourd’hui à l’État de fournir, enfin, un accompagnement aux victimes. Pour les aider à soigner leurs blessures physiques et psychologiques, afin de leur permettre d’affronter ce procès.
* Le massacre du 28 septembre 2009 avait fait plus de 157 morts, 89 disparus et 1 500 blessés, selon le bilan de l’ONU. 109 femmes avaient été violées par les forces de sécurité.
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