Reportage Afrique

Ouganda: la réintégration des anciens rebelles partis en Centrafrique [3/3]

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Troisième et dernier reportage de notre série dans le nord de l’Ouganda, à l’occasion de l’audience par contumace de confirmation des charges contre Joseph Kony à la CPI. Le leader de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA – acronyme en anglais) est accusé de crimes de guerre et crimes contre l’humanité pendant le conflit qui a ravagé le nord de l’Ouganda entre la fin des années 1980 et le milieu des années 2000. Depuis, le groupe armé s’est exporté dans d’autres pays d’Afrique centrale. Fin 2023, 134 anciens membres, incluant femmes et enfants, ont été rapatriés de Centrafrique vers l’Ouganda. C’est le plus grand retour de repentis de la LRA ces dernières années. Après un an et demi en centre de réhabilitation et l'obtention d'une amnistie, les anciens rebelles sont retournés à la vie civile depuis quelques mois, dispersés dans plusieurs petits groupes dans la région nord du pays.

Après un passage dans un centre de réhabilitation, les ONG Terra Renaissance et Pax ont remis des maisons et des terres aux anciens rebelles de la LRA rapatriés de Centrafrique en 2023 pour aider à leur réintégration.
Après un passage dans un centre de réhabilitation, les ONG Terra Renaissance et Pax ont remis des maisons et des terres aux anciens rebelles de la LRA rapatriés de Centrafrique en 2023 pour aider à leur réintégration. © Lucie Mouillaud / RFI
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Reportage dans le district de Pader, au nord de l’Ouganda

Devant une maison en briques entourée de champs de sésame, de maïs et de soja, Walter Okot fait sécher les dernières récoltes : « Quand je suis arrivé en Ouganda, j’ai eu le sentiment de revenir à la maison. J’étais très heureux. On recommence à peine notre vie, mais c’est bien mieux que ce qu’on vivait avant de revenir. »

Derrière le rideau d’entrée, l’ancien rebelle a entreposé son vélo et quelques ustensiles de cuisine, parmi les biens accumulés depuis son retour en Ouganda… Les cinq membres de son groupe ont tous passé entre 20 et 30 ans au sein de la LRA, avant de quitter l’unité principale de Joseph Kony : « C’était en 2018, nous devions le rejoindre au Darfour où il était à l’époque. Il n’avait déjà plus beaucoup de soldats. Mais on a entendu des rumeurs d’exécutions et d’arrestations parmi les rebelles, c’est ce qui nous a poussé à partir. »

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Le retour des repentis en Ouganda

Les rebelles s’installent alors à Mboki, à l’est de la Centrafrique, jusqu’à leur rapatriement en 2023. Enlevé par la LRA adolescent, Thomas Onayo, 45 ans aujourd’hui, reprend ses repères dans sa région natale, où il a pu revoir une partie de sa famille : « Ils m’ont accueilli et m’ont assuré que j’étais toujours le bienvenu à la maison. Tout le monde était heureux et m’a embrassé, mais ma mère m’a expliqué la situation de la famille. Beaucoup de nos terres ont été vendues, et ils survivent sur le peu qu’il reste. »

Pour éviter les conflits familiaux, accompagnés par des ONG, les repentis ont reçu des terres, des maisons et des formations pour les aider dans leur réintégration. Jimmy Otema, de l’organisation Terra Renaissance : « On les a formés pour les activités qu’ils ont choisies, mais aussi sur leurs compétences sociales. Avec les chefs traditionnels, nous avons fait en sorte qu’ils soient accueillis par les cérémonies traditionnelles de réconciliation. Et puis, nous organisons parfois des réunions entre les anciens LRA et les communautés voisines. »

Un processus de réintégration lent et progressif, destiné à mener à l’indépendance économique des repentis, qui attendent la finalisation de leur atelier de menuiserie pour pouvoir commencer à travailler.

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