Reportage Afrique

Congo-B: les populations construisent avec engouement près des nouvelles casernes militaires

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Au Congo-Brazzaville, l’inquiétude des autorités sur les risques d’une répétition de la catastrophe de MPILA en 2012. L’explosion d’un dépôt d’armes et de munitions de l’armée avait fait près de 300 morts, plus de 2 300 blessés et plus de 17 000 sans-abris à Brazzaville. Depuis, les autorités congolaises ont décidé d’éloigner les casernes de la ville. De nouveaux bâtiments viennent d’être construits, mais le problème, c’est que des populations civiles s’installent à proximité. Trop risqué, dit le gouvernement qui veut les déloger. Des civils qui brandissent pourtant des titres de propriété et qui entendent bien résister.

Vue du camp militaire Mont Mambou à l'ouest de Brazzaville, le 8 janvier 2023.
Vue du camp militaire Mont Mambou à l'ouest de Brazzaville, le 8 janvier 2023. © RFI / Loïcia Martial
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De notre correspondant à Brazzaville,

À un jet de pierre du camp Mont Mambou, flambant neuf, à l’ouest de Brazzaville, Philippe Mbouta, un commerçant de 48 ans, est en plein chantier sur un terrain de 400 mètres carrés dominé par le sable. « J’ai commencé depuis pratiquement trois mois. Je suis en train d’ériger un R+1. La partie du bas sera à usage commercial et en haut je serai là avec ma famille. Je suis non loin du camp militaire. »

Philippe Mbouta affirme mettre en valeur un espace obtenu selon les règles. « J’ai acheté mon terrain auprès du terrien. Je peux même vous montrer mes papiers. Mais, on est acculés par les militaires parce que nous sommes trop proches du camp. S’ils veulent prendre jusqu’à chez nous, ils n’ont qu’à exproprier, parce que nous avons acquis légalement (les terrains) comme eux. J’ai les papiers délivrés par le même terrien. »

Juste en face de Philippe, Joseph Missossa, 73 ans, vit dans une baraque faite de tôles. Il vend de la bière y compris aux jeunes ouvriers qui travaillent sur place à l’ombre d’un manguier. « Ils sont en train de bâtir les briques pour une prochaine construction chez moi. Où est-ce que je vais encore aller ? Le peu de temps qui me reste c’est ici que j’ai pensé à le passer. »

Des titres de propriété remis en cause

Au cours d’une récente visite des nouvelles casernes, le Premier ministre Anatole Collinet Makosso s’est félicité des investissements réalisés. Mais, il a dit regretter le fait que des populations construisent autour, remettant en cause leurs titres de propriété. « Des comportements de cette nature ne sont pas de nature à favoriser le développement. Et, pour éviter que nous n’arrivions au pire, des instructions vont être données au ministre en charge des Affaires foncières, aux Forces de défense et de sécurité, de procéder au déguerpissement de ceux qui ont occupé les abords de ces casernes. »

Analysant la situation, Franck Chardin Aubin Tchibinda de l’Observatoire congolais des droits de l’homme (OCDH) estime que l’État a une part de responsabilité. « C’est comme un signe d’impuissance de la part de l’État qui aujourd’hui laisse les gens occuper les alentours de ces camps, alors que l’objectif était d’éloigner l’armée du centre de là où vivent les populations. Donc, ça nous préoccupe. »

Les populations entendent « traîner l’État en justice » au cas où elles venaient à être déguerpies au lieu d’être indemnisées conformément à la loi sur les expropriations. 

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