Reportage Afrique

Nigeria: un déplacé du Borno, de retour dans sa communauté d'origine avec sa famille, raconte

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Au Nigeria, suite aux offensives de la Force multinationale mixte, la paix est revenue dans les principales localités dans de l'État de Borno, si bien que quelque 140 000 personnes ont quitté huit camps situés à l'intérieur de Maïduguri. Cette politique de relogement a été impulsée par Babagana Zulum, gouverneur de l'État. Notre correspondant Moïse Gomis s'est rendu à Auno, à 25 km de Maiduguri. Il a rencontré Mai Aji Kolo qui a reçu les clefs d'une maison neuve, une allocation financière et des vivres pour au moins trois mois. Cet ex-déplacé a vécu pendant dix ans dans un camp à Maïduguri. Sa famille et lui réapprennent à vivre, normalement. Reportage.

La politique de relogement des déplacés au Nigeria a été impulsée par le Professeur Babagana Umara Zulum, gouverneur de l'État de Borno.
La politique de relogement des déplacés au Nigeria a été impulsée par le Professeur Babagana Umara Zulum, gouverneur de l'État de Borno. RFI Hausa
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de notre correspondant, de retour de Maïduguri

À longueur de journée, Mai Aji Kolo pousse une charrette aux quatre coins de ce nouveau lotissement d'Auno. Il transporte des bidons d'eau. Mai Aji Kolo est aussi disponible aussi pour livrer du bois.

Il a les traits du visage marqués par les efforts physiques, mais ce quarantenaire est en paix désormais avec lui-même. Il habite avec sa femme et ses sept enfants dans un logement en dur, après dix ans passés dans plusieurs camps de Maiduguri.

« En fait, je suis serein, car à chaque fois que je quitte ma maison et que je reviens, je retrouve ma famille saine et sauve et la communauté aussi vit en paix maintenant sans aucun problème avec Boko Haram. »

En 2015 et en 2019, Mai Aji n'avait pas voté comme des millions de déplacés de l'État du Borno. Cette année, il ne votera pas non plus. Car cet ex-déplacé n'avait pas la tête à chercher une nouvelle carte d'électeur.

Maïduguri, Borno: camp de déplacés, mai 2022.
Maïduguri, Borno: camp de déplacés, mai 2022. AP - Chinedu Asadu

Le ventre creux mais à la maison

Mai Aji attend surtout avec impatience la saison des pluies. Les réserves de nourriture reçues de la part de l'État de Borno et de donneurs sont épuisées. Les 100 000 nairas, soit l'équivalent de 200 euros, d'aide à l'installation sont aussi un lointain souvenir.

« Nous cultivons pendant la saison des pluies, nous produisons de la récolte deux à trois sacs de nourriture qui peuvent nous faire vivre pendant un certain temps. Nous ramassons également du bois pour faire du feu avant la fin de la saison des pluies. Et ça, c’est un vrai plus pour notre subsistance. »

En attendant, le quotidien de la famille de Mai Aji est donc difficile. Certains jours, il y a à peine un repas à partager. Pourtant, Mai Aji préfère avoir le ventre creux, mais vivre chez lui.

À Auno, il se sent plus fort et moins vulnérable. « Il y a des soldats qui patrouillent toujours jour et nuit, alors nous dormons les deux yeux fermés jour et nuit. De temps en temps, il y a des voleurs qui volent nos petites choses à manger. À part ça, nous n'avons pas de problème maintenant. »

Et cette présence militaire est renforcée par l'appui de miliciens volontaires. Car ici, à moins de 25 km de Maiduguri, la dernière attaque mortelle de Boko Haram remonte à février 2021.

Dans une semaine auront lieu les élections générales au Nigeria. Le président Buhari s'était fait élire en 2015 pour sa capacité présumée à combattre frontalement Boko Haram. Au moment de son entrée à la villa présidentielle d'Aso Koro à Abuja, le drapeau noir des insurgés dirigés par Abubakar Shekau occupait près de 40 % des territoires de l'État du Borno. Huit ans plus tard, Boko Haram est éclaté en plusieurs groupes et s'est replié sur des poches réduites (forêt de Sambisa, îles du Lac Tchad) suite aux offensives de la Force multinationale mixte.

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