Reportage Afrique

Ouganda: la communauté LGBTQ+ hébergée dans des refuges cachés vit dans la peur de représailles

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En Ouganda, le président Yoweri Museveni a renvoyé devant le Parlement la proposition de loi anti-homosexualité votée par les députés le 21 mars dernier Dans la capitale Kampala, les membres de la communauté LGBTQ+ craignent, face à une montée des discours de haine, des violences encore plus récurrentes qu'auparavant. Reportage dans une maison d'accueil et église, refuge pour femmes transgenres pour la plupart chassées par leur famille.

Des membres de la communauté LGBTQ ougandaise rendent hommage aux victimes des crimes de haine à Kampala, le 23 novembre 2019 (image d'illustration)
Des membres de la communauté LGBTQ ougandaise rendent hommage aux victimes des crimes de haine à Kampala, le 23 novembre 2019 (image d'illustration) AFP - SUMY SADRUNI
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De notre correspondante à Kampala

Tous les dimanches après-midi, Maria prépare en chantant la quinzaine de résidentes, femmes transgenres, dans l’une des chambres du refuge, avant le début de la messe célébrée dans l’enceinte de la maison. « On se maquille, on porte des perruques, puis on s’occupe des tenues. C’est un jour où on se retrouve, tous ensemble, pour prier, alors c’est une très belle journée. »

Une à une, chacune des résidentes passent entre les mains expertes de Maria. De l’extérieur, les hauts murs qui entourent cette maison en périphérie de Kampala ne laissent rien apparaître aux passants. Le refuge idéal pour cette église cachée, réservée à la communauté LGBTQ+.

 « Il y a beaucoup de haine qui met ma vie, en tant que femme transgenre, en danger. Nous sommes à une période où nous n’avons pas d’autre choix que de nous soutenir les uns les autres. C’est pour cette raison que nous nous réunissons pour de telles occasions. Mais à côté de ça, on a toujours en tête que ce n’est pas une garantie, que même dans un tel espace, nous ne serons pas attaqués. »

Récemment, le refuge a changé d’emplacement, après l’agression dans la rue d’une des résidentes ; conduisant le propriétaire à découvrir l’identité de ses locataires et à les expulser. Pendant le service, les chants sont ponctués de prises de parole et de prières pour les membres de la communauté LGBTQ+ arrêtés ces derniers jours. Pour le pasteur de cette église inclusive, l’important est de créer un environnement sécurisé pour les pratiquants.

«  La plupart d’entre nous viennent de familles chrétiennes, alors c’est très important pour nous de trouver un espace où on nous comprend. Qu’on soit gay, qu’on soit transgenre, qu’on soit lesbienne, c’est là où Dieu a placé notre force ».

«  Les refuges sont vraiment à risque »

Depuis le début des discussions sur la proposition de loi anti-homosexualité, les résidents redoublent de précaution. De nouvelles règles de sécurité ont été instauré par le responsable de la maison d’accueil.

«  Les refuges sont vraiment à risque. Avant, on avait près de 70 personnes qui venaient pour l’église. Mais en ce moment, nous sommes très stricts. Par exemple, personne ne rentre après 18h, il n’y a qu’une personne, assez masculine, pour faire les courses, et même maintenant, on interdit aux résidents d’utiliser les sites de rencontre, parce que beaucoup d’homophobes se cachent sur ces sites ».

Pour l’église et refuge LGBT, les yeux sont désormais rivés sur le Parlement, après la demande de révision de la proposition de loi par le président Yoweri Museveni. Avec un espoir : que le chef de l’État renonce à signer le texte de loi. largement dénoncé par le Haut-Commissaire aux droits humains de l’ONU et qu'il qualifie comme l’un des « pires au monde en son genre », prévoyant la peine de mort pour homosexualité aggravée, des sanctions pénales criminalisant les rapports homosexuels ou le simple fait de se revendiquer de la communauté LGBTQ+, mais aussi la non-dénonciation ou l’hébergement de personnes homosexuelles.

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