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RDC: explosion des violences sexuelles dans les camps de déplacés du Nord-Kivu [1/2]

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En à peine deux semaines, plus de 670 victimes de violences sexuelles ont été prises en charge par les équipes de Médecins Sans Frontières (MSF) dans et aux alentours du chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Un pic rarement atteint. Ces victimes sont des déplacées installées dans différents sites, dont Eloime, Munigi, Lushagala, Kanyaruchinya, Rusayo et Bulengo, près de Goma. Comment expliquer cette explosion de cas ? Reportage à Bulengo. 

Des déplacés ayant fui les affrontements entre l'armée congolaise et le M23 à Munigi, dans la périphérie de Goma (image d’illustration).
Des déplacés ayant fui les affrontements entre l'armée congolaise et le M23 à Munigi, dans la périphérie de Goma (image d’illustration). © Guerchom Ndebo / AFP
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De notre correspondant de retour de Goma, 

Feza revient de la colline qui supplante le camp de déplacés. Le colis de bois de chauffe à ses pieds, elle reconnaît être chanceuse, elle n’est pas tombée entre les mains d’hommes armés. « À cause du manque, les femmes se rendent dans la forêt pour couper le bois de chauffe, explique-t-elle.  Malheureusement, il y a des groupes armés et les rebelles. Ils sont nombreux là-bas. Nous nous demandons souvent : sommes-nous toujours dans notre pays, le Congo, ou sommes-nous des étrangers ? ».

Dans cette zone, les femmes vivent la peur dans le ventre. « À cause de la faim, je suis obligée d’aller dans la forêt, témoigne Amina. Malheureusement, c’est une zone que je ne connais pas. Nous allons souvent vers la cité de Saké. Et là-bas, quand ces gens te croisent, ils te prennent de force. Tu ne pourras même pas savoir qui sont ces gens. Ils te prennent, te bandent les yeux et te ligotent. Tu ne sauras pas qui t’a fait ça. Si tu as de la chance, on va te retrouver et t'emmener à l’hôpital »

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Des viols au sein même des sites des déplacés

Même à l’intérieur du camp, les femmes ne sont pas épargnées. À côté de sa fille de trois ans, Ange vit toutes les nuits dans l'inquiétude pour elle et sa fille. « Vous voyez où nous habitons, ce n’est qu’une moustiquaire, montre-t-elle. Il n'y a même pas de bâche, pas de porte. Les hommes de ce camp, ou même ceux de l’extérieur, peuvent entrer sans difficulté. Tu ne peux pas crier. Certains viennent avec un couteau, ou une machette, d'autres ont même des fusils ».

Ange aurait aimé être entendue, protégée et croire en la justice, mais elle préfère se taire : « Tu ne peux même pas dénoncer ton agresseur parce qu’il peut te tuer. Il y en a même qui reviennent le lendemain pour te menacer de mort ».

Préoccupé, Bruno Lemarquis, le représentant spécial adjoint du secrétaire général des Nations unies, attend également l’implication des autorités congolaises. « Il y a beaucoup de problèmes d’insécurité, relate-t-il. C’est toute la question du rôle de la police. Le gouverneur nous a expliqué les mesures qui sont en train d’être prises. On comprend les contraintes au niveau des effectifs, mais c’est un gros souci ».

Entretemps, sur le terrain militaire, M23 et FARDC se regardent toujours en chiens de faïence.

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