Reportage Afrique

Les incertitudes et les projets des Sud-Soudanais de retour au pays après avoir fui la guerre au Soudan [3/3]

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Au Soudan du Sud, les rapatriés du Soudan font face à des difficultés une fois passée la frontière. Ils sont plus de 90 000 à avoir fui les affrontements qui ravagent notamment la capitale, Khartoum, depuis le 15 avril. Et dans leur grande majorité, ils sont aujourd’hui coincés près de la frontière, dans la petite ville de Renk, les moyens de transport étant insuffisants pour continuer leur voyage. Ils étudiaient ou travaillaient au Soudan, certains ont vécu là-bas pendant des années, des décennies... Leurs vies se sont effondrées d’un coup. Leur retour très chaotique au Soudan du Sud est comme un nouveau départ, ils tentent de se projeter dans l’avenir en faisant fi des incertitudes et crainte.

Des Sud-Soudanais patientent dans le centre de transit de Renk, près de la frontière avec le Soudan, après avoir fui les combats, ici le 17 mai 2023.
Des Sud-Soudanais patientent dans le centre de transit de Renk, près de la frontière avec le Soudan, après avoir fui les combats, ici le 17 mai 2023. © Sam Mednick / AP
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Avec ses enfants et petits-enfants, Okony Yor, 75 ans, a marché une bonne partie de la route depuis Khartoum. Assis sous un abri de fortune dans la chaleur infernale du port de Renk, près du Nil, rentrer dans son village d’origine, Kodok, ne l’inquiète pas : « Je veux retourner chez moi à Kodok. Je veux cultiver. Je vais préparer mon champ et quand les pluies viendront, je planterai. J’espère que les ONG pourront m’aider, mais c’est mon projet de toute façon. Je n’ai pas peur des conflits car d’autres villageois sont toujours au village. Je vais être avec eux, on va rester ensemble ».

Elizabeth Mayik, 63 ans, a passé près de 10 ans à Khartoum. En attente elle aussi de prendre un bateau pour Malakal, elle tente de se projeter : « Ça fait presque dix ans que j’ai quitté Malakal sans y retourner. Une fois sur place, je pourrai me rendre compte de la situation, j’aurai les idées claires et je saurai quoi faire. Donc si je vois que la sécurité est correcte, je vais tout de suite construire un abri sur le terrain que je possède. Je n’ai pas peur de la guerre au Soudan du Sud. Je suis contente d’être de retour dans mon pays. C’est Dieu qui nous a fait revenir aussi vite et a fait que nous ne sommes pas morts en route ».

Bien sûr, beaucoup espèrent que la guerre s’arrête au Soudan, pour pouvoir éventuellement y retourner… Des pensées que partage Peter Gatkuoth, 51 ans, qui avait fui les violences à Malakal en 2014 : « Beaucoup de Sud-Soudanais pensent à retourner au Soudan. Si la situation s’améliore, tout le monde va y retourner. Parce que là-bas, vous pouvez vivre confortablement, il y a du travail… Ici, tout ce qui nous a forcés à fuir est toujours pareil, rien n’a changé. C’est notre crainte. Nous prions juste que les choses changent et que nous n’ayons pas à fuir à nouveau. Nous sommes prêts à rester dans notre pays pour contribuer à son développement et pour améliorer la situation ».

Pour faciliter l’installation des rapatriés dans leurs régions d’origine, les autorités et l’ONU vont leur fournir des rations alimentaires, et d’autres équipements de base pour construire des abris. Des milliers d’entre eux affluent vers les différents camps de déplacés du pays, à Malakal mais aussi à Juba, faute de solution alternative.

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