Reportage Afrique

Éthiopie: à Addis-Abeba, le triste ramadan des Soudanais séparés de leurs familles par la guerre

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Près d’1,7 million de Soudanais passent le mois du ramadan loin de leur pays, après avoir fui la guerre et les combats qui continuent d’y faire rage. Près de 36 000 ont passé la frontière à l’est, pour être en Éthiopie et demander le statut de réfugiés. D’autres ne sollicitent pas la protection des ONG, et vont directement jusqu’à la capitale, Addis-Abeba. Ils attendent un visa pour pouvoir partir dans un autre pays ou rentrer chez eux. Beaucoup sont là depuis plusieurs mois et se sentent bloqués dans cette ville immense, où l’on ne parle pas leur langue.

Des musulmans se rassemblent sur la place Meskel à Addis-Abeba, en Éthiopie, avant de rompre le jeûne  organisé pendant le mois sacré du ramadan, en avril 2023 (image d'illustration).
Des musulmans se rassemblent sur la place Meskel à Addis-Abeba, en Éthiopie, avant de rompre le jeûne organisé pendant le mois sacré du ramadan, en avril 2023 (image d'illustration). AFP - AMANUEL SILESHI
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De notre correspondante à Addis-Abeba,

Beaucoup de réfugiés soudanais logent à Haya Ulet, un quartier en plein cœur d’Addis-Abeba. Ils se retrouvent dans les quelques restaurants de spécialités soudanaises présents dans la capitale éthiopienne. Ici, ils peuvent se sentir un peu à la maison et rompre le jeûne du ramadan ensemble. Même si pour Ali, 18 ans, c’est très différent : « C’est dur de faire le jeûne ici. Il faut trouver la plus grosse communauté soudanaise pour passer le ramadan ensemble parce que si je reste avec les Éthiopiens, je ne saurai pas quand il faut casser le jeûne. Tu ne peux même pas entendre la prière, et il n’y a pas beaucoup de mosquées. »

Ali est à Addis depuis cinq mois. Pour lui, la vie est trop chère ici : « Si la guerre s’arrête, je retournerai au Soudan, mais pour le moment, je voudrais aller en Europe par tous les moyens. Parce que la vie est difficile ici, on doit payer 100 $ par mois pour le visa et puis on a vécu la guerre. »

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Des conditions difficile de jeûne

Amal est arrivée en novembre, elle attend d’avoir un visa pour partir en Arabie saoudite. Pour elle, rien n’est comme avant : « Ici il n’y a pas notre nourriture traditionnelle, les traditions sont différentes, donc on jeûne et puis c’est tout. On avait l’habitude de se préparer pour le ramadan avec tout notre cœur, spirituellement, mais aussi financièrement. Mais ce n’est plus pareil, nous avons été forcés de quitter notre pays, les familles sont séparées, certains sont allés à l’est, à l’ouest, en Égypte, certains sont dans des camps de réfugiés. C’est la pire des situations. »

Sahar est là depuis un mois avec ses deux filles de 15 et 18 ans. Elle voudrait rejoindre son mari qui a réussi à aller en France : « Regardez mes filles, ça fait plus d’un an qu’elles n’ont pas étudié, elles perdent l’habitude, elles ne s’exercent plus. Déjà avant au Soudan les études étaient souvent interrompues, mais là en plus, elles ont des images de combats, de guerre et pleins de choses négatives dans leur tête. »

Difficile de faire le ramadan dans ces conditions. Les réseaux sont coupés, impossible d’avoir des nouvelles des proches restés dans le pays en guerre. « Je suis inquiète, si mon père est vivant ou pas, je ne sais pas. Les proches qui nous envoyaient de l’argent ne sont plus joignables. »

L’ONU a demandé aux belligérants un cessez-le-feu à l’occasion du ramadan. Refusé par les forces armées soudanaises.

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