Reportage Afrique

Lybie: le camp Haftar investit la ville de Derna avec son indispensable mais opaque politique du béton [3/3]

Publié le :

Le Fonds libyen de développement et de reconstruction est devenu depuis janvier dernier la principale arme politique des autorités de l’est libyen. La stratégie du fonds dirigé par un fils de Khalifa Haftar, le maréchal et homme fort du Cyrénaïque, est de moderniser et remodeler entièrement la région. Mais si les chantiers sont visibles sur le terrain, la pérennité et le fonctionnement de ce fonds interroge.

Des familles venant profiter du parc de la rue des Jardins, à Derna, construit après la catastrophe qui a ravagé cette ville de l'Est libyen.
Des familles venant profiter du parc de la rue des Jardins, à Derna, construit après la catastrophe qui a ravagé cette ville de l'Est libyen. © RFI
Publicité

Dans la rue de Cyrénaïque, les panneaux de chantiers siglés du Fonds de reconstruction et de développement sont presque aussi nombreux que les affiches à la gloire du maréchal Khalifa Haftar.

Le fonds est dirigé par son fils, Belkasem Haftar, qui a une obsession, prouver aux Libyens et aux étrangers que son organisation travaille : « Depuis 2006, les maintenances des écoles, des hôpitaux et des routes ont été négligées. Nous les réparons parce que ces bâtiments fournissent un service quotidien pour les citoyens. Nous refaisons aussi le réseau routier qui est en ruine, le réseau électrique et le réseau d’assainissement. Tout a été négligé depuis 20 ans. »

Une reconstruction concrète aux détails flous

Sur le terrain, les progrès sont indéniables. 2 000 logements flambants neufs seront remis aux familles sinistrées en septembre 2024. La vie se modernise au rythme des pelleteuses, selon la stratégie de Belkasem Haftar. À Derna, les cafés mixtes ont fait leur apparition. À Benghazi, des espaces piétons sont aménagés.

Mais le fonctionnement du Fonds demeure opaque. Les contrats ne respectent ni les règles de l’appel d’offres, ni celle du gré à gré. Belkasem Haftar explique que le financement provient d’une partie du budget de l’État alloué à l’investissement.

Claudia Gazzini, chercheuse à l’ONG internationale Crisis group, pointe, elle, des zones d’ombre : « Le Parlement a crédité le fonds de 10 milliards de dinars. Mais au-delà de ce chiffre, la modalité de financement, sur quels chapitres, sur quels articles s’inscrit le fonds, rien n’est clair. »

À lire aussiLibye: à Derna, suite aux inondations, un nouvel urbanisme pour faire renaître la ville [1/3]

« Tous les regards se focalisent sur Derna »

Pour la population, seul le résultat compte. À l’image de Najib Souaissi : « La vie à Derna était difficile avant. Il n’y avait pas de projets avant l’inondation. Même le commerce n’était pas très actif. La situation était très difficile. Mais depuis l’inondation, on est au centre des projecteurs, tous les regards se focalisent sur Derna. Les autorités essayent d’aider au maximum la reconstruction de la cité de Derna. »

Au lendemain de l’inondation, le jeune homme de 22 ans était parti refaire sa vie à Benghazi. Six mois après, celui qui a perdu toute sa famille dans la catastrophe était de retour, impressionné par le nouveau visage de sa ville.

À lire aussiLibye: comment Derna tente de se reconstruire neuf mois après avoir été ravagée par les flots

NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail

Suivez toute l'actualité internationale en téléchargeant l'application RFI

Voir les autres épisodes