Avec la guerre en Ukraine, le groupe Nexter augmente sa cadence de production d'obus d'artillerie
Publié le :
La guerre en Ukraine se joue aussi dans le centre de la France. C'est près de Bourges que le groupe Nexter fabrique les obus de 155 mm des canons Caesar. Les obus de gros calibre sont devenus une denrée recherchée depuis le début l'invasion russe de l'Ukraine. Pour répondre aux commandes européennes destinées à Kiev, l'industriel français s'est engagé à augmenter ses capacités de production.

À l'entrée de l'usine, une pancarte indique 132 jours sans accident du travail. Pas d'écart possible avec la sécurité, martèle Hervé Le Breton, responsable du site, et c'est d'ailleurs un bras robot automatisé qui s'occupe de la manutention des obus. « On est donc sur la zone où on va usiner le corps de l'obus. À la fin de cette machine, on a un obus qui est terminé, usiné, prêt à partir en peinture », indique Hervé Le Breton.
Pour répondre à une demande exponentielle en munitions, la machine travaille en trois-huit, le samedi compris et sans doute bientôt le dimanche, souffle le chef d'atelier François Astruc. « On a deux tours en parallèle et on doit obtenir en moins de 10 minutes un corps d’obus ceinturé. Donc là, le robot va emmener la pièce de poste en poste. On charge 10 kilos d'explosifs dans le corps d'obus », indique-t-il. Hérvé Le Breton poursuit : « L'explosif va ressembler à de la pâte à crêpe quand il est liquide, donc on va venir le couler à l'intérieur de l'obus. Après, cet explosif, pour l'initier, on va mettre le pain qui va servir d'amplificateur de la détonation. »
► À lire aussi : La France va fournir 12 canons Caesar supplémentaires à l'Ukraine
Des savoirs-faire uniques
Pour produire plus, Nexter recrute, mais il faudra des mois pour former les ouvriers, il n'y a pas d'écoles de pyrotechnie en France. Tout repose sur des savoirs-faire uniques. Yoann Renon, par exemple, est spécialiste de la compression des pains d'explosifs logés dans les obus.
« Le principe, ça va être de prendre de l'explosif sous forme granulaire que l'on va mettre dans un gros canon rempli d'huile à 140°C. On va venir monter à 2 000 barres », explique Yoann Renon. « Donc en fait, on a récupéré le canon numéro 7 du cuirassé Richelieu qui est un navire français de la Seconde Guerre mondiale. On a gardé la partie qui pouvait emmagasiner les plus grandes charges d'énergie. On a gardé la culasse aussi d'origine de 1,5 tonne et nous, on va remplir tout ça, on va venir injecter les 2 000 bars de pression. Sous l'effet de la chaleur et de la pression de 2 000 bars, tous les grains vont se restreindre jusqu'à faire un bloc qui va être uniforme et homogène, surtout. »
L'ambition de doubler la production
En juillet dernier, la France a passé en urgence une commande de 5 000 obus de 155 mm, ce qui n'était pas arrivé depuis des années et une seconde commande vient d'arriver cette fois de 16 000 pièces, d'autres devraient suivre, mais Guillem Monsonis, directeur de la communication du groupe Nexter, se demande comment tenir la cadence, alors qu'apparaissent certaines pénuries sur des produits critiques.
« Les poudres propulsives, très clairement. C'est la raison pour laquelle il y a un projet de constitution d'une filière souveraine française. L'identification de ces chemins critiques a par exemple, amenés à la décision d'ouvrir une seconde unité de ceinturage gros calibre. Et là, c'est quelque chose qui est en cours, donc on va doubler cette capacité pour redimensionner l'outil à la hauteur des enjeux. »
Et pour être à la hauteur des enjeux, Nexter ambitionne de doubler sa production, 100 000 obus de 155 mm par an d'ici à deux ans. Une production cependant sans aucune commune mesure avec le rythme d'un conflit de haute intensité, qui chaque jour consomme plusieurs milliers d'obus.
NewsletterRecevez toute l'actualité internationale directement dans votre boite mail
Je m'abonne